Le 29 octobre dernier, trois dispositifs de la Ville de Nice ont permis de mettre hors d'état de nuire le terroriste de Notre-Dame, trente minutes après le début de l'attaque.
Grâce à la borne d'appel d'urgence, une brigade de policiers municipaux armés est rapidement envoyée sur place. Ces derniers ont neutralisé l'individu alors qu'il venait de poignarder mortellement trois personnes. Les caméras de surveillance ont retracé ses mouvements.
Souvent critiquée, parfois moquée, la politique ultra-sécuritaire de Nice, mise en place après l'arrivée au pouvoir de Christian Estrosi en 2008, est aujourd'hui perçue comme un exemple, en France comme à l'étranger. Retour en quelques dates.

2008 > 2011
En 2008, Estrosi ne s'installe pas dans son fauteuil de maire de Nice qu'avec un discours ferme contre la criminalité : il prend vite des décisions radicales. Il y a dix ans, les Alpes-Maritimes figurent parmi les départements les plus violents du pays, la délinquance est à un haut niveau à Nice et même le centre-ville "craint". L'Express classait notre ville parmi les pires de France en matière de sécurité.
Le nouveau premier magistrat va alors développer l'un des systèmes de vidéoprotection parmi les plus étendus et les plus perfectionnés dans l'Hexagone, comme en Europe. Et à marche forcée : en 2011, 600 caméras ont déjà été installées.
"Inutile d'en placer partout dans Nice sans qu'il n'y ait personne pour les regarder" explique toujours le maire lorsqu'il fait visiter son Centre de supervision urbain (CSU).
De fait, à mesure que les caméras fleurissent aux quatre coins de la capitale azuréenne, les effectifs de la police municipale s'étendent également, pour contrôler les écrans (aidés par un puissant logiciel basé sur l'intelligence artificielle) comme pour remplacer des policiers nationaux dont la présence se raréfie dans nos rues.
La "PM" de Nice devient la première de France : les brigades sont assignées à une zone donnée, pour créer un lien avec les riverains et les commerçants.
On compte aujourd'hui environ 550 agents dans ses rangs, 80 supplémentaires vont être recrutés d'ici à 2021.
Pendant son premier mandat, le maire mène plusieurs actions remarquées en matière de sécurité, ferme des lieux de prières clandestines, évacue les squats… un activisme qui conduit la presse à l'imaginer "ministre de la Sécurité publique" sous Nicolas Sarkozy.
D'ailleurs, il demande des comptes à ses municipaux… comme aux policiers nationaux, desquels il attend des résultats, rapides et tangibles.
Estrosi, digne héritier de Jacques Médecin, le créateur de la première police municipale, chouchoute ses hommes. En 2009, les agents de la PM sont dotés de pistolets à impulsions électriques (PIE), les fameux Taser.
Cela aura un "effet préventif sur la délinquance. Aujourd'hui le policier est une cible facile pour le voyou qui sait que l'agent se sert rarement de son arme à feu" vante le maire à propos de cette arme non-létale. Il n'hésite d'ailleurs pas une seconde à se faire tirer dessus sur TF1 pour tester le nouveau dispositif (vidéo ci-dessus).
"On a de la chance d'avoir un maire qui prend soin de nous. Nous sommes correctement équipés et bien formés. On se sent en sécurité", souligne alors le syndicat Force ouvrière. "Cet équipement est capital, car la délinquance est de plus en plus violente. Elle combat avec des armes de guerre et les policiers sont des cibles."
Cette politique paie rapidement. Dans notre ville, la délinquance baisse de 7% entre janvier 2009 et janvier 2010.
2015 > 2018
Estrosi demande que ses agents aient un gilet pare-balles, et un pistolet semi-automatique, comme les policiers nationaux. C'est cet armement qui a permis de neutraliser efficacement le terroriste de Notre-Dame. Depuis 2017, les agents niçois sont équipés de 9mm.
Ombre à ce grand tableau d'efficacité : alors qu'il avait déclaré après l'attentat de Charlie Hebdo que "Si Paris avait été équipé du même matériel (de vidéosurveillance – NDLR) que nous, les frères Kouachi n’auraient pas passé trois carrefours sans être repérés", celui de Nice n'empêche pas non plus l'attaque du 14 juillet 2016. L'élu dit en avoir tiré "de la détermination et de l'humilité".
Le maire veut également que les municipaux et nationaux travaillent davantage ensemble et échangent plus : ce sera matérialisé avec l'annonce de la création d'un "super-commissariat" regroupant les deux forces et un centre "d'hypervision" dans l'ancien hôpital Saint-Roch. Il sera livré dans les prochains mois.
Sa proposition avait été critiquée, elle est aujourd'hui largement saluée par les chefs d'établissements niçois : en janvier 2018, la Ville envoyait dans dix-huit de ses écoles un policier municipal. L'objectif est alors d'accompagner la communauté éducative "dans le contrôle des accès, (…) les conseils en sécurisation, présentation des dangers de l'Internet, prévention à la sécurité routière, mais aussi les atteintes à la laïcité."
2019 > 2020

En décembre 2019, 16 "bornes de police-secours" sont installées à des points stratégiques, directement reliés au Centre de supervision urbain. L'une d'elle a permis de sonner l'alerte pendant l'attaque terroriste de Notre-Dame.
"Société de vigilance"
"Seize bornes d’appel d’urgence installées en décembre 2019 ont permis plus de 600 signalements. J’ai décidé d’en ajouter 170 devant chaque école de la ville. 30 seront installées en novembre, 40 en décembre, 50 en janvier et 50 en février, a annoncé ce 5 novembre le maire dans Nice-Matin. C’est un des volets de la société de vigilance que j’appelle de mes vœux."
Après que plusieurs fusillades liées au trafic de drogues ont éclaté à Nice cet été, la Ville de Nice obtient de mener une expérimentation sur l'extension des compétences de la police municipale. Si la loi passe, elle pourrait être menée d'ici l'an prochain.
"Elle aura les mêmes moyens d'agir que la police nationale : elle pourra désormais consulter le fichier des personnes recherchées, contrôler les identités, ouvrir et fouiller les coffres de voitures…" détaillait cet été le maire. "La police municipale pourra mener des initiatives offensives et non pas seulement défensives."
"La peur est maintenant dans le camps des barbares et des dealers"
Christian Estrosi
Aujourd'hui
Et maintenant ? Il nous manque la reconnaissance faciale ! Le maire a d'ailleurs adressé ces jours derniers une lettre au Premier Ministre Jean Castex afin de lui demander d’autoriser, enfin, ce système, déjà expérimenté dans notre ville.
"Depuis 24 heures, par voie de presse, j’apprends l’arrestation dans la ville de Nice et dans le département, de potentiels complices du tueur de la basilique Notre-Dame. Son cheminement et les rencontres qu’il aurait faites sont également évoqués", écrit ainsi Christian Estrosi.
Avant de faire valoir : "Le système de reconnaissance faciale permet, en insérant l’image du visage d’un individu dans le logiciel, de retracer immédiatement son parcours. Cette recherche pourrait être étendue aux personnes actuellement interpellées, ce qui permettrait d’accélérer considérablement l’enquête."