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Comme nous vous l'annoncions hier, une manifestation contre les violences policières est prévue ce samedi 6 juin à Nice. Le Rassemblement national a demandé son interdiction (voir notre article), dénonçant des risques de troubles à l'ordre public et une idéologie "anti-policiers".
Différents collectifs azuréens soutiennent la "marche pacifique" : l'Union nationale lycéenne (UNL), l'Association pour la démocratie à Nice, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP), la Ligue des droits de l'Homme (LDH), "Tous Citoyens" ainsi qu'"Habitat et Citoyenneté".
Emma B., porte-parole du mouvement et étudiante niçoise de 20 ans, a choisi "Nice-Presse" pour répondre aux questions soulevées par ce projet.
NICE-PRESSE. Vous organisez une manifestation samedi à Nice. Quels en sont les mots d'ordre ?
Emma B. : Je relaie les messages de notre cause mais je ne me vois pas comme une organisatrice. La marche pacifique de samedi est plutôt issue d'un collectif de jeunes engagés et mobilisés. Nous dénonçons les systèmes oppressifs et discriminatoires dont sont l'objet les minorités au sens large dans notre pays : les Noirs, les Arabes, les LGBT+… Ces discriminations peuvent se matérialiser, on le voit avec l'affaire George Floyd, par des cas de violences policières.
NP. Pensez-vous vraiment que notre système soit comparable à celui des Américains ?
E.B. : Non. La société américaine est basée sur le racisme, ce n'est pas le cas en France. Nous n'avons pas la même Histoire. Les méthodes policières et le contexte ne sont pas les mêmes.
NP. À l'annonce de cette manifestation, beaucoup de Niçois ont réagi en craignant des dégradations alors que les commerces viennent de rouvrir et sont en grandes difficultés économiques après deux mois de confinement.
E.B. : Dans toutes les manifestations, il y a des risques de dérapages. Parfois, certains apportent leur haine dans un environnement qui ne voulait pas l'accueillir. Mais nous allons tout faire pour que l'évènement soit une réussite et que tout ce passe dans le calme. Notre parcours, de Magnan jusqu'au Palais de Justice, évite soigneusement de longer les commerces pour ne pas les gêner. Et nous serons attentifs à tout mauvais comportement, parce qu'il ne pourrait rien nous arriver de pire que la violence vienne des nôtres.
NP. Pourtant, elle n'est pas déclarée en préfecture.
E. B. : Dans le peu de temps que nous avons pour organiser tout cela, nous mettons en oeuvre tout ce qui est possible pour organiser notre marche dans les règles et nouer le dialogue avec les autorités concernées.
NP. Philippe Vardon, patron du Rassemblement national local, a demandé l'interdiction de votre manif', l'accusant d'être "anti-policiers".
E. B.: L'esprit même de notre marche, c'est la paix. On manifeste, notamment, contre les violences policières, pas contre les policiers. Si vous voulez, on ne va pas s'élever contre des discriminations en faisant nous-mêmes des amalgames. Dire que tous les agents des forces de l'ordre sont violents ou racistes, ce serait aussi stupide que de dire que tous les Noirs ou les Arabes sont des délinquants. On refuse toute forme d'amalgames, d'un côté comme de l'autre.
Je suis moi même métisse, je connais la puissance de la diversité, des mélanges. C'est ce que nous voulons montrer samedi : ce n'est pas un groupe de personnes contre un autre. C'est nous tous, en tant que société, contre le racisme.
NP. Il s'est également interrogé sur vos liens avec l'extrême-gauche. Êtes-vous politisée ?
E. B.: Quand des jeunes organisent un évènement comme celui-là, ils accueillent toutes les bonnes volontés, notamment celles des associations déjà implantées qui savent faire tout cela. Je n'ai pas de combat politicien ou de parti à défendre, et notre marche non plus. Le combat contre la haine dépasse tout cela.
Propos recueillis par Clément Avarguès le 4 juin 2020.