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"Sur les marchés, personne ne me parle de culture !" regrette l'avocate niçoise Alexandra Masson-Bettati (ex-LR/UMP), choisie par le Rassemblement National et la Droite populaire pour mener leur liste dans les Alpes-Maritimes pour les régionales. Attaquée par plusieurs artistes sudistes, la formation lepéniste défend ses propositions culturelles et s'emploie à calmer les esprits… dans une campagne où les électeurs ne semblent s'intéresser qu'aux sujets sécuritaires.
NICE-PRESSE : Olivier Py, le président du Festival d'Avignon, se dit inquiet d'une arrivée au pouvoir du Rassemblement national en Paca. Que lui répondez-vous ?
Alexandra Masson-Bettati : "On a vu des articles passer au sujet de divers artistes qui se disent angoissés, effectivement. C'est une posture, à mon avis. Thierry Mariani et moi-même avons été acteurs du monde culturel en Provence-Alpes-Côte-d'Azur chacun à notre niveau depuis très longtemps.
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Certains disent 'on a peur d'une arrivée du RN'. Ce n'est pas fondé, mais pourquoi pas.
Ce qui n'est pas compréhensible avec Olivier Py, c'est qu'il dit craindre pour ses financements alors même qu'il affirme qu'il refuserait nos subventions si nous étions élus. Il y a un problème de cohérence intellectuelle chez ce monsieur.
En disant ça, il met en danger ceux qui vivent de ce festival. Cette posture est dangereuse parce qu'il risque de les sacrifier."
N-P : Sa position n'est pas isolée, puisque dans une tribune publiée dans la presse, 67 signataires (directeurs de salles ou de festivals) affirment également redouter une élection de Thierry Mariani…
"Quelque chose me perturbe : à chaque fois, ils se disent inquiets, mais on ne sait pas pourquoi. J'aimerais qu'ils développent. C'est préoccupant de ne pas aller dans le fond des choses."
N-P : Dans l'hypothèse où vous remportez l'élection à la fin du mois, comment appréhendez-vous vos relations avec le milieu culturel, manifestement en partie craintif ?
"Nous organiserons des rencontres, de façon formelle et informelle, pour tenir compte des demandes. Peut-être que nous pérenniserons l'aide accordée à certaines associations, que nous en soutiendrons certaines davantage si besoin. Il y aura des choix culturels qui seront faits, bien sûr.
"Du temps de la gauche, les structures que je dirigeais en tant que femme de droite étaient aidées. Je ne vois pas pourquoi il en serait autrement avec le RN à la Région"
Alexandra Masson-Bettati
Les troupes de théâtre plutôt de gauche, qui font du bon travail, mériteront évidemment les subventions de la collectivité."
N-P : Une asso qui appellerait à voter contre vous dimanche ou dans l'entre-deux-tours serait-elle mise de côté après une victoire de votre liste ?
"Ceux qui mêlent engagements associatif et politique font une erreur.
Cela dit, nous n'allons pas mettre en cause des manifestations culturelles qui plaisent à beaucoup de monde uniquement parce que son directeur aurait décidé, personnellement, d'appeler à 'faire barrage' contre nous."

Le programme
N-P : Renaud Muselier (RN) propose d'augmenter le budget de la culture de 10%. Vous avez promis de le sanctuariser, à tout le moins, voire "de l'augmenter si possible". Savez-vous de combien ?
"Si nous sommes élus, nous ferons un état des lieux de ce qui a été fait par la précédente mandature.
Franchement, on a tous envie d'augmenter ce budget puisque la culture est un élément fondamental de lien social, particulièrement dans le Sud. Je n'ai pas envie de vous annoncer un chiffre, mais l'intention et la volonté sont là.
La culture doit aller en extérieur, être accessible à tout le monde, j'y suis très attaché. Tout comme Thierry Mariani, puisque c'est l'un des premiers à avoir lancé du théâtre de rue à Valréas.
N-P : Qu'entendez-vous par cet objectif lu dans votre programme : "se tourner vers une politique culturelle enracinée"?
"L'idée est de valoriser toutes nos traditions, notre patrimoine, notre histoire locale, d'où l'on vient. Par exemple, nous avons une vraie architecture dans le comté de Nice, et en Provence. Il faut les défendre."
N-P : Venons-en aux propositions concrètes : vous souhaitez développer divers parcours…
"Ce sont deux projets qui me tiennent à coeur. Il y aura une route Napoléon, qui, à grande échelle, sera mise en valeur pour retracer son histoire. Les touristes qui arrivent en Paca doivent pouvoir découvrir cet itinéraire.
Il y aura aussi un travail sur la Via Julia Augusta, avec les différentes villes et les vestiges gréco-romains."
N-P : Vous comptez soutenir davantage les communes dans la préservation du patrimoine : comment faire ?
"Beaucoup de villages ont leur lavoir traditionnel, une fontaine, un petit monument aux morts, une chapelle… Ils n'arrivent pas toujours, par manque de fonds, à les entretenir alors que ce sont les lieux les plus visités. Je ne vais pas vous répondre très précisément mais nous allons voir comment les aider. Avec la volonté, nous trouverons."
N-P : Votre liste propose d'approfondir nos relations culturelles avec l'Espagne et l'Italie, de quelle façon ?
"Il y a des projets transfrontaliers qui peuvent être menés avec l'Italie, avec des parcours, des pistes cyclables, pour valoriser le patrimoine de Roquebrune-Cap-Martin jusqu'à Sanremo.
Nous souhaitons également créer une application pour les smartphones : quel que soit l'endroit où l'on se trouve en Paca, on vous géolocaliserait pour vous proposer des musées, des galeries d'art, des monuments…"
N-P : Qu'avez-vous en tête pour l'art contemporain, et les cultures urbaines ?
"Avec le 1% culturel, une partie de chaque budget dédié à une construction publique doit être utilisé pour une oeuvre d'art. Je voudrais qu'on le double au niveau de la Région, à titre de test pendant une année. C'est très important puisqu'il permettrait de pérenniser le travail des artistes locaux, avec des sommes importantes et régulières."
Propos recueillis par Clément Avarguès le 11 juin 2021