À dix jours du premier tour, le candidat du Rassemblement national livre les points clés de son programme municipal, alors qu’il est placé dans le trio de tête par les derniers sondages
RIVIERACTU. À quoi ressemblerait Nice dirigée par vous ?
Philippe Vardon. On a une différence de vision fondamentale avec Christian Estrosi, quasiment une différence de philosophie. Le maire a une approche ringarde des choses. Il se pense moderne, la réalité c’est qu’il a un tram de retard : il est dans la logique d’un développement à outrance. C’est le fantasme d’une ville-monde, d’une métropole européenne.
Je ne veux pas transformer Nice, je veux la retrouver. En une phrase, je veux une ville qui redevienne plus sûre, plus prospère, plus fière.
Une commune gérée par le RN, c’est plus de sécurité, moins d’impôts, moins de dette.
Avec des sondages moroses et une partie du territoire qui n’aura finalement pas de liste RN, la campagne est-elle plus difficile que prévu pour votre parti ?
Je ne crois pas. On veut garder les villes que nous avons déjà, cela semble bien engagé, et en conquérir de nouvelles, nous avons bon espoir.
On est au coeur d’une séquence territoriale plus longue, avec ensuite les départementales, les régionales. Dans le passé, il nous a manqué une bonne implantation. Ça progresse dans le bon sens.
“Je ne veux plus d’un islam en régie municipale”
Vous vous êtes opposé au maire ces derniers jours à propos d’un projet de mosquée à l’ouest de Nice. Pour être clair, êtes-vous contre la construction d’une nouvelle ?
Si une nouvelle mosquée devait être construite, dans l’absolu, il faudrait que tout soit dans les règles sur les plans financier, juridique, sécuritaire.
Mais ce n’est pas tout. Avec moi, il n’y aurait pas d’islam en régie municipale. Estrosi gère l’UOIF (la controversée Union des organisations islamiques en France, devenue Musulmans de France, NDLR) comme un clos de boules ou une association sportive. Moi ce qui m’intéresse, c’est la dimension idéologique.
On peut parler de logistique, quel terrain, quelle taille… sauf que même si un lieu de culte coche toutes les garanties mais qu’il invite des types comme Hani Ramadan, la super-star des mosquées niçoises, avec une idéologie radicale, il est tout de même extrêmement dangereux.
La priorité du politique, ce doit être de garantir le respect de la loi et de nos valeurs.
Comment faire ?
Je ne mettrais jamais de terrain ou de local municipal à disposition pour y construire une mosquée. Je fermerais toutes celles qui sont radicales et qui y sont hébergées.
Les locaux de la Roquebillère ou de la route de Grenoble, par exemple, peuvent avoir une autre destination qui profite davantage à l’intérêt général.
On a 19 mosquées à Nice, avec a minima 80% qui sont sous la coupe de ceux qui professent l’idéologie des Frères musulmans. Je ne suis pas sûr qu’il y en ait besoin de nouvelles, parce que je crains qu’elles soient de nouveaux aux mains des mêmes.
Celles qui existent sont parfois vétustes, trop petites, mal adaptées, alors qu’il y a un certain nombre de pratiquants dans notre ville. Il n’y a pas un vrai besoin, de rénovation et/ou de construction ?
Ce n’est pas à moi de gérer ça. C’est une question exponentielle, tant qu’on aura Emmanuel Macron qui fait entrer 400.000 immigrés par an, il faudra toujours plus de mosquées.
Toujours est-il que, sans parler des nouveaux arrivants, il y a environ 60.000 Niçois de confession musulmane. Il faut bien qu’ils aient des lieux décents pour pratiquer leur culte comme les autres administrés, non ?
Ça ne veut rien dire, “il faut bien”. Ce n’est pas aux pouvoirs publics de résoudre cela, j’estime que ça ne me concerne pas.
Mon rôle comme maire serait d’empêcher l’emprise islamiste sur notre ville. Moi je n’aurais pas de dialogue avec des imams liés aux Frères musulmans, c’est très clair.
“Pas de laïcité agressive, extrémiste”
Comment s’organiseraient, en tant que maire, vos relations avec les cultes ?
Estrosi avait fait son conseil de suivi du culte musulman, avec des gens liés à l’UOIF. Je n’ai pas à en refaire un, le code des collectivités territoriales ne m’y oblige pas du tout. Comme pour toutes les associations, il pourrait y avoir des discussions, si tant est qu’elles respectent à la fois la loi et les valeurs de notre pays.
On ne va pas faire table rase. À Nice, on est une ville de pénitents, avec un catholicisme populaire. Il est évident que moi je ne ferais pas dans la laïcité agressive et extrémiste.
Oui, comme je le fais déjà en tant qu’élu, je serais sans doute dans la barque avec la Vierge Marie le 15 août et, oui, j’honorerais le Voeu de Nice à l’église. Que l’on croit ou non, ce sont des traditions qui rythment nos vies.
“Quand quelqu’un vient de l’autre bout du monde pour visiter Nice, ce n’est pas pour y voir des kebabs”
On connait votre opposition passée aux kebabs, qui représenteraient pour vous “l’islamisation de Nice”. À Béziers, Robert Ménard (apparenté RN) n’en veut plus dans le centre-ville.
On pourrait penser à en encadrer le nombre. Mais c’est un débat plus large, à dimension culturelle.
On peut m’expliquer que l’avenir de Nice c’est de devenir une petite Istanbul. Mais si on veut que notre ville reste ce qu’elle est, c’est mieux qu’il y ait un peu moins de kebabs et un peu plus de socca, c’est évident.
La question, plus largement, c’est l’avenir de nos commerces. Quand quelqu’un vient de l’autre bout du monde pour visiter Nice, ce n’est pas pour voir ce genre d’enseigne dans la vieille ville.
Certains commerces du centre historique ne sont pas à la hauteur de ce que Nice peut offrir, notamment à ceux qui viennent nous découvrir.
Je pense aussi à l’avenue Jean Médecin. Avant, c’était les Champs-Elysées du Sud, avec de grandes enseignes. Ce n’est plus le cas, on est coincés entre H&M et Foot Locker… Nous ne sommes pas obligés de reproduire les traumatismes des autres villes.
Le problème c’est ce qu’on a laissé faire. Mais il n’y a pas de fatalité dans tout cela.
“Je ne soutiendrais plus les associations politisées”
À quoi ressemblerait votre politique associative ?
Les seules associations qui seraient soutenues par ma municipalité seraient celles qui aident les Niçois, pas celles qui aident le maire.
On veut sanctuariser le budget. En clair, on distribuerait les mêmes sommes, mais pas forcément aux mêmes.
Je suis par exemple choqué par l’intervention dans le domaine politique d’associations subventionnées. Prenez Pasteur Avenir Jeunesse (Paje): ils sont aidés à tous les étages, ils sont partout… et quand il y a une élection, ils vont donner une consigne de vote au second tour. Ça me dérange.
Je suis contribuable, je ne vais pas payer pour me faire cracher au visage. Il faut en finir avec l’énorme mélange des genres qui existe à Nice.
Je ne veux plus qu’il y ait de patrons d’assos au cabinet du maire ou dans son équipe.
“Il y a également trop de pression sur les associations sportives : quand le cabinet du maire les contactent, ce n’est pas un téléphone qu’elles ont sur la tempe, c’est un flingue”
Je ne comprends pas, par exemple, pourquoi des conseillers départementaux vont utiliser une salle d’un club pour organiser leur galette. Il faut mettre un terme à ce genre de pratiques.
Concernant votre équipe municipale, prendriez-vous des mesures pour garantir des pratiques éthiques ?
Je ne me suis pas lancé dans la course à l’échalote sur cela, contrairement à d’autres candidats. Il y a déjà assez de choses.
EN RAPPORT… Plus blancs que blancs ? Les candidats niçois lancés dans la course aux plus “éthiques”
Nous, on propose plus de transparence et d’exemplarité : il y a une impression très “Las Vegas” dans les délibérations : c’est un peu “ce qu’il se passe au conseil municipal reste au conseil municipal”. Nous généraliserions la publication des votes sur Internet, et nous sanctionnerions les absentéistes.
“Il y a un énorme problème avec nos écoles”
Sur les écoles, partagez-vous le consensus à droite comme à gauche concernant la nécessité d’un vaste plan de rénovation des établissements ?
Il y a un vrai besoin. Je suis un père de famille, j’ai trois enfants, je le vois : il y a un énorme problème avec nos écoles. C’est hallucinant qu’on ait laissé les choses se dégrader à ce point là.
“On doit s’occuper des SDF français et européens en priorité”
21% des Niçois sont pauvres, un chiffre six points au-dessus de la moyenne nationale. Ce dernier monte à plus de 45% dans certains quartiers. Quelle politique sociale mettriez-vous en place en tant que maire ?
Dans cette ville, il y a un vrai sujet sur le handicap, que nous aurions aimé développer davantage pendant cette campagne.
Le sujet est global : il faut recréer de l’attractivité, de l’activité, pour remettre au travail les gens qui veulent bosser. Notre ville perd des emplois et des habitants.
Concernant la grande pauvreté, tant qu’on aura des frontières ouvertes et des migrants qui viennent prendre la place de nos SDF, ça sera compliqué.
“Marine Le Pen dit que j’ai une fibre sociale développée”
Nice manquait déjà de places d’hébergement d’urgence bien avant la crise migratoire, et tous les SDF ne sont pas des migrants ou des réfugiés. Qu’est-ce que votre municipalité ferait pour eux ?
Une bonne partie de ceux qui dorment dans les foyers d’accueil sont des migrants.
On doit s’occuper des SDF français et européens en priorité, avec des places d’hébergement d’urgence.
Vous savez, j’ai passé des années à distribuer de la soupe à tout le monde, c’est un sujet très dur.
Après, dans une ville qui a notre météo, on a en vérité une vraie attractivité pour les SDF, donc c’est un peu le tonneau des Danaïdes. Si on crée de nouveaux espaces, on crée un afflux.
Il faut s’occuper des nôtres avant des autres.
Le Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) garderait le même budget ? Il a été diminué dans d’autres municipalités RN.
Je ne suis pas sur le principe de le baisser. Ce n’est pas dans ma nature politique profonde… Marine Le Pen dit que j’ai une fibre sociale développée.
Je sais aussi d’où je viens.
“Jugez moi sur ce que je suis aujourd’hui”
Vous qui travaillez dans la communication, ne diriez-vous pas qu’au delà de votre programme, de votre étiquette, ce qui peut vous nuire politiquement, c’est justement votre image, liée notamment à votre passé identitaire ?
Ce n’est jamais agréable d’être caricaturé, et certains portraits sont plus honnêtes que d’autres.
J’ai 39 ans, bientôt 40, je suis un père de famille. J’ai un parcours qui n’est pas si original, en tout cas dans notre mouvance politique, pour des gens qui ont commencé à la fréquenter dans les années 1990.
Je suis un petit blanc de cité, j’ai pu me réfugier dans la chaleur, la force d’un groupe. Comme ceux, dans une certaine mesure, qui peuvent tomber dans la délinquance. Ça aurait pu m’arriver, si j’avais reçu une autre éducation.
Est-ce que je referais aujourd’hui tout ce que j’ai pu faire il y a 25 ans ? Évidemment non. Jugez moi sur ce que je suis aujourd’hui.
L’explication d’une enfance compliquée, dans un contexte qui l’est aussi, ne semble pas vous convenir en revanche pour expliquer aujourd’hui le comportement de certains jeunes dans les cités niçoises, que vous dénoncez.
Il faut voir de quels écarts on parle. J’ai par exemple été condamné pour avoir fait un tract “Ni voilée, ni violée”. Il y a des condamnations que je porte comme des médailles.
“J’ai un tempérament assez calme”
Certains portraits vous dépeignent comme quelqu’un d’impulsif, voire de violent.
J’ai eu une amende pour m’être défendu contre des types qui voulaient m’agresser devant mes enfants : je défendrai toujours ma famille.
Pour ce à quoi vous faites allusion, notamment un papier de franceinfo:, c’est assez ridicule. Je n’ai menacé personne pour une liste, ni souhaité m’attaquer à une communauté, contrairement à ce que les témoins (des conseillers d’Estrosi) ont raconté comme mensonges.
Ceux qui me connaissent savent que j’ai un tempérament assez calme.
On en sait peu sur votre vie privée. La fonction de maire de Nice est très exposée, la famille de Christian Estrosi est bien connue des Niçois. Si vous étiez maire, vous vous exposeriez davantage ?
J’ai trop de respect pour la politique pour en faire un espèce de show à la NRJ12. Le protocole m’intéresse peu mais quand je vois l’épouse du maire, une vraie “first lady”, au premier rang des inaugurations devant des élus, ça m’interroge.
Je ne mêlerai pas ma famille à tout cela : mon action, je l’incarne seul.