"Si la Corse et la République se font confiance, nous triompherons du crime", a affirmé samedi le préfet de Corse, Jérôme Filippini, lors du premier colloque antimafia organisé sur l'île par le collectif Massimu Susini, à Cargèse, au nord d'Ajaccio.
Présent tout au long de la journée, Jérôme Filippini a prononcé ces paroles lourdes de sens en réponse à l'interrogation d'un citoyen sur les divers contrôles administratifs, exhortant la Corse à "dépasser le passé" : "Si la Corse et la République se font confiance, nous triompherons du crime. Sinon, le crime a déjà gagné", a-t-il martelé.
En introduction, il avait confié ressentir "beaucoup de plaisir, mais aussi beaucoup de gravité à être ici". Depuis l’intervention du Garde des Sceaux, Gérald Darmanin, devant l’Assemblée de Corse jeudi, la parole semble s’être libérée, notamment concernant "l’existence d’une mafia en Corse".
Nicolas Septe, procureur d’Ajaccio, a quant à lui évoqué l’arrivée de 50 personnels judiciaires supplémentaires pour renforcer la justice en Corse et appuyer la lutte contre les phénomènes mafieux.
Il a également répondu aux critiques visant la proposition de loi contre le narcotrafic, adoptée à l’unanimité par le Sénat. Ce texte prévoit notamment la création d’un parquet national dédié à la criminalité organisée, certains y voyant une menace pour les droits de la défense.
"À côté des droits de la défense, il y a aussi un objectif à valeur constitutionnelle : la recherche des auteurs d’infractions, le droit à la sécurité", a souligné Nicolas Septe, insistant sur le fait que "la criminalité organisée, la mafia, est intriquée dans la société civile".
"À Marseille, on sait quels quartiers éviter. En Corse, on ne sait jamais sur qui l’on va tomber ni qui détient réellement un commerce. L’imbrication est telle qu’il faut l’appréhender différemment", a-t-il poursuivi.
Jean-Philippe Navarre, procureur de Bastia, a de son côté insisté sur la nécessité de renforcer "la démonstration de l’efficacité judiciaire" à travers une coopération "globale", articulée autour du triptyque "coordination, spécialisation des magistrats et techniques spéciales d’enquête".
S’exprimant sur le rapport consacré aux "dérives mafieuses" officiellement présenté jeudi par le président autonomiste du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, et adopté vendredi par l’Assemblée de Corse, Romain Colonna, élu de la majorité nationaliste, a rappelé que ce document avait nécessité deux ans de travail et 35 réunions.
Toutefois, il a dénoncé l’absence totale de participation de l’État à ces échanges : "L'État n'a pas participé à une seule d'entre elles", a-t-il accusé.
(Avec AFP)