L’homme fort du Conseil départemental et le maire de Nice ont adoubé cette semaine leurs candidats pour les prochaines législatives, envoyés les uns contre les autres dans les Alpes-Maritimes. On fait le point, pour le pays niçois.
Commentaire - L’unité de façade a sauté. Qui se souvient encore qu’il y a un an, à l’occasion des départementales, la droite maralpine présentait partout sur le territoire des duos de candidats estrosistes et ciottistes unis, sans faire (trop) de vagues ? Depuis, Christian Estrosi a quitté LR pour la Macronie, et Eric Ciotti ne se prive plus pour torpiller publiquement les différents projets de son grand ennemi.
Jamais l’hégémonie des Républicains dans les Alpes-Maritimes n’a été si menacée qu’en ce moment. Y aura-t-il toujours 6 députés LR (sur 9) dans notre département le 19 juin ? Les deux barons du département présentent chacun leurs candidats dans les trois circonscriptions du pays niçois (la Ire, la IIIe et la Ve): on vous fait les présentations.
Première circo : Ciotti en confiance
Territoire : centre-ville de Nice et Port Lympia
Sortant : Eric Ciotti (LR, élu en 2007)
Le combat des fauves politiques n’aura pas lieu. Un temps, le “roi du Port” (bien qu’Eric Ciotti n’habite pas à Nice), 56 ans, a pu craindre d’être confronté à Olivier Bettati, vingt ans de carrière politique dans les pattes.
Finalement, Christian Estrosi envoie Graig Monetti face au sortant. Qui ça ? L’adjoint à la jeunesse du maire de Nice, passé par les organisations estudiantines locales avant de devenir le chef de cabinet de la ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal.
Pas de succès électoral d’importance à son actif, une notoriété et une implantation au ras des pâquerettes… C’est peu dire que le défi dans lequel se lance Graig Monetti est grand.
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À 28 ans et avec une belle énergie, il pourra tout de même jouer la carte du renouvellement face à un député qui a déjà fait trois mandats. En 2017, une inconnue, l’avocate LREM Caroline Reverso-Meinietti, avait menacé de faire chavirer le maître du Port, le talonnant au première tour.
Autre point fort, cette année, Monetti aura toute l’organisation du camp Estrosi avec lui, et on la sait redoutablement efficace. Ça n’avait pas été totalement le cas pour la candidate marcheuse la fois précédente.
Le très solide patron du RN niçois, Philippe Vardon, 41 ans, a choisi comme il y a cinq ans de ne pas affronter Eric Ciotti. Bonne nouvelle pour le patron des LR dans le 06, tant leurs électorats ont fini par se confondre avec les années.
À noter que Reconquête, le parti d’Eric Zemmour, n’envoie personne dans la Ire.
Troisième circo : les jeux sont ouverts
Territoire : Nord-Est et Ouest de Nice
Sortant : Cédric Roussel (LREM, élu en 2017)
La troisième circo fait pour l’instant figure de royaume de l’absurde… ou des règlements de comptes.
Côté macronistes, on enverrait deux candidats. Les investitures nationales ne sont pas encore tombées, un accord reste donc possible d’ici au dépôt limite, le 20 mai.
Cédric Roussel, 49 ans, est candidat à sa réélection depuis quelques semaines déjà. Conseiller en patrimoine de métier, il gagne en 2017 avec l’étiquette LREM, après avoir rejoint En Marche dès le début de l’aventure macroniste, en 2016. Premier fait d’armes, il élimine au premier tour le sortant Rudy Salles, solidement installé dans la IIIe circo depuis 6 mandats ! Le RN fait 40% au second.
Surtout positionné sur les sujets liés au sport, il n’a pas profité d’autant de médiatisation que ses collègues en pointe sur le sécuritaire (Eric Ciotti) ou des sujets de société porteurs (droit à mourir dans la dignité pour Marine Brenier, bien-être animal pour le Maralpin Loïc Dombreval…).
Pourtant soutien affiché d’Emmanuel Macron, Christian Estrosi a fait le choix d’envoyer l’un de ses proches face à Cédric Roussel. Sans doute n’oublie-t-il pas que ce dernier a tenté de se présenter contre lui aux dernières municipales…
Le “candidat mairie” sera donc Philippe Pradal, 59 ans.
Certainement sous l’étiquette Horizons (le parti de l’ex-Premier ministre Edouard Philippe) cet expert-comptable de formation a été maire de Nice, entre 2016 et 2017. Il est aujourd’hui adjoint chargé des finances, et vice-président de la Métropole NCA.
“Pur produit Estrosi”, il est apprécié à droite comme à gauche pour sa connaissance des dossiers, son affabilité et sa droiture.
Les Républicains investissent, de leur côté, le professeur Laurent Castillo. Médecin ORL, il est président de l’Institut de la face et du cou . Politiquement, il appartient au collectif Osez la France, porté par le député LR du Vaucluse Julien Aubert.
Ciottiste assumé, il a fait déplacer le congrès des ORL de Nice à Cannes pour protester contre la démolition du Palais Acropolis, décidée par Christian Estrosi.
L’extrême droite se lance également tout feu, tout flamme dans la course. Reconquête envoie dans la troisième circonscription une inconnue, la collaboratrice parlementaire Hermine Falicon. Le Rassemblement national, contre toute attente, pourrait investir l’ancien premier adjoint niçois passé par le camp Zemmour, Benoît Kandel, plutôt que son propre patron local, Philippe Vardon. Qui, lui, se présentera dans tous les cas dans la IIIe, avec ou sans investiture ! (Lire sa réaction dans nos colonnes)
Cinquième circo : le combat des protégées
Territoire : Nice-Ouest, et de Levens jusqu’à Saint-Etienne-de-Tinée
Sortante : Marine Brenier (Horizons ex-LR, élue en 2016)
Elle change de camp en cours de route. Candidate à sa réélection comme elle l’avait annoncé dans Nice-Presse fin mars, Marine Brenier, 35 ans, a claqué la porte des Républicains vendredi, avant de rejoindre Horizons.
Pour obtenir l’investiture LR, Eric Ciotti, patron de la fédération maralpine, lui demandait de quitter la majorité estrosiste du conseil municipal niçois. Et si elle ne rejoignait pas la Macronie, Christian Estrosi aurait envoyé un candidat face à sa protégée, qu’il a fait entrer en politique il y a plus de dix ans.
Marine Brenier a donc changé de crémerie, à un mois de l’élection. Après avoir soutenu jusqu’au bout Valérie Pécresse, pendant la présidentielle. Elle assure qu’on ne l’a “forcée à rien”, mais il est permis d’en douter.
Bien connue par les Niçois, son implantation n’est plus à démontrer.
Ses adversaires pourront lui reprocher le fait qu’elle aurait pu mener davantage de combats locaux ces dernières années. En 2019, elle avait par exemple annoncé vouloir porter une proposition de loi relative à la protection des recettes et créations culinaires, idée lancée par des Niçois. Une autre élue maralpine devrait prendre le relais dans les jours à venir, a-t-on appris, devant le manque de résultats obtenus…
Elle a toutefois pu défendre des sujets réclamés à Nice, concernant les compétences de la police municipale ou la qualification des dépôts sauvages.
Un nouvel affront : dans la “circonscription de coeur” de Christian Estrosi, Eric Ciotti a fait investir l’une de ses ennemies notoires : la maire LR de Rimplas, Christelle d’Intorni.
Surnommée « Démolition girl » à cause (ou grâce à) son fort caractère et son charisme certain, cette avocate de profession a souvent ferraillé contre le président de la Métropole NCA, dont elle est toujours vice-présidente et avec qui elle a été élue à la Région en 2015 (elle a été éjectée du groupe majoritaire ensuite).
Des rumeurs avaient déjà pu lui prêter l’intention d’être candidate à la mairie de Nice, en 2020.
Je suis heureux d’apporter mon total soutien à la candidature de @C_Dintorni, ma binôme au conseil départemental dans la 5ème circonscription des Alpes-Maritimes.
— Eric Ciotti (@ECiotti) April 30, 2022
Elle représentera la candidature de la fidélité à un territoire et aux valeurs de la droite face au macronisme. pic.twitter.com/TKYRhn4Vpz