Opposant farouche à toute alliance entre la droite et les macronistes, le député des Alpes-Maritimes aurait vu d'un très bon oeil le coup de main donné par le parti de Marine Le Pen pour lui sauver sa place de député il y a quatre ans. Une possible alliance secrète qui sème le trouble.
Voilà qui ferait tâche. "Traîtrise, coup de poignard.…" depuis dimanche, Éric Ciotti n'a pas de mots assez durs pour condamner le rassemblement entamé entre la liste Les Républicains et celle de la République en Marche pour les régionales en Paca. Pourtant, d'après le Canard enchaîné ce mercredi 4 mai, le député LR aurait, lui, reçu un "cadeau électoral" du Rassemblement national, en 2017.
Rembobinons. Nous sommes en pleine campagne des législatives, juste après la victoire d'Emmanuel Macron à la présidentielle. Chez nous, plusieurs candidats se disputent la première circonscription des Alpes-Maritimes : Éric Ciotti, le frontiste Philippe Vardon, et la marcheuse Caroline Reverso-Meinietti, notamment.
D'après Olivier Bettati (un temps élu UMP au côté d'Estrosi, passé au RN avant de s'en éloigner…), le député Ciotti, pris de panique, aurait demandé un arrangement. Face à la vague macroniste et au très implanté Philippe Vardon, il risque son siège. D'autant qu'à l'époque, il accuse Christian Estrosi de favoriser son adversaire LREM pour lui faire perdre l'élection. Pour lui l'heure est grave… il faut donc sortir Vardon de l'équation.
C'est en tout cas la version qu'avance Bettati au Canard enchaîné :
"Je suis intervenu pour Ciotti. Il était tétanisé, il craignait de perdre son siège face à LREM. Je l'ai vu chez lui, il m'a demandé de trouver un accord Vardon et le FN. Ce que j'ai fait"
Olivier Bettati
Dans la foulée, le RN (ex-FN) Philippe Vardon part faire campagne dans la troisième circonscription, plus populaire, se faisant remplacer dans la première par un illustre inconnu qui terminera la course avec un score médiocre.
Le palmipède avance une preuve pour accréditer toute cette thèse : le conseiller régional lepéniste aurait fait allusion à ce marchandage dans un récent SMS envoyé à l'un de ses collaborateurs : "Je ne vois pas la moindre raison que Ciotti bénéficie du même cadeau que la dernière fois".
Éric Ciotti a-t-il été sauvé par le Rassemblement national en 2017 ? D'après lui, tous ces éléments relèvent de la "fable totale" et il assure n'avoir "jamais parlé avec Philippe Vardon".
Tout en reconnaissant ne "pas avoir mis le paquet" contre le député sortant, Philippe Vardon a, lui aussi, démenti tout accord dans les colonnes du Canard.
Au Rassemblement national, on entend les balles siffler… contre Ciotti. "On a bien compris qu'avec la guerre qui reprend chez les Républicains, de 'vieux' dossiers sont ressortis au moment opportun" souligne un cadre du parti auprès de Nice-Presse. "En 2017, Vardon n'a pas eu de consigne du parti pour sauver Ciotti. C'est un cadeau dont il aurait été, de toute façon, peu reconnaissant. Mais dans un face à face, Ciotti et lui auraient fait campagne sur le même terrain. Plus grand chose ne le sépare de nous".
Une dernière assertion que ne dément pas, d'ailleurs, Marine Le Pen. Le 30 avril, elle notait même dans le HuffPost :
"Je suis prête à faire des compromis, mais les idées d'Éric Ciotti ne m’obligeraient même pas à en faire…"
Marine Le Pen
Un frontiste proche du dossier dément également cet accord : "C'est une version romancée de l'histoire. L'équipe RN n'a pas 'mis le paquet', comme on l'a lu, contre Ciotti parce que la circonscription (le 1re) était difficile, surtout avec ses moyens de l'époque. La troisième circonscription, sociologiquement, était plus proche de nous."
Ce n'est pas la première fois ces dernières jours que la proximité supposée du député Ciotti avec le parti de Marine Le Pen fait polémique. Vendredi dernier dans les colonnes de Valeurs actuelles, il lâchait ainsi que "ce qui sépare Les Républicains du Rassemblement national, c'est globalement la capacité à gouverner". Devant le tollé suscité, il est depuis revenu sur ses propos… tout en ayant repris les éléments de langage et les propositions du parti à la flamme depuis déjà plusieurs années.
La condamnation de Christian Estrosi n’a pas traîné. Samedi 1er mai, le maire de Nice a pointé ceux qui « ne cessent de conduire (sa) famille politique vers des dérives politiques pour camoufler (leur) propre sectarisme en attaquant par des mensonges voire la calomnie. Cela ressemble fortement au type de posture que l’extrême droite utilise depuis des années et cela m’inquiète énormément ».
Avant de rappeler ce que le président du conseil régional Renaud Muselier avait déjà reproché à Éric Ciotti la semaine dernière :
"Au soir du premier tour de la présidentielle, il a fait partie de ceux qui n’ont pas fait de choix entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Manifestement c’est un choix qui s’inscrit de manière durable"
Éric Ciotti, de son côté, défend sa ligne, qui n'aurait "jamais varié". Une position d'une extrême droiture…