Après trois procès et une saisine du Conseil constitutionnel, Cédric Herrou, défenseur emblématique des migrants, a été relaxé ce mercredi 13 mai par la cour d'appel de Lyon.
BRÈVE — "Je ne vois pas comment ils pouvaient me condamner. C'est l'État qui avait fait des actions totalement illégales", a déclaré à l'AFP l'agriculteur militant de la vallée de la Roya (frontière entre la France et l'Italie). "On a réussi à voir, enfin, ce qu'était la fraternité"
Le Conseil constitutionnel avait estimé que "la liberté d'aider autrui dans un but humanitaire" était légitime, dans une décision rendue publique le 6 juillet 2018.
La Cour de cassation avait annulé une condamnation de M. Herrou et demandé qu'il soit rejugé.
L'activiste était poursuivi pour "aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d'étrangers en France" - d'environ 200 migrants (principalement érythréens et soudanais) arrivés en 2016 d'Italie jusque dans sa propriété.
Un collectif d'habitants et d'associations avait ouvert un lieu accueil dans une installation désaffectée de la SNCF. Cédric Herrou est arrêté octobre 2016 avec trois autres personnes puis placé en garde à vue.
"Délit de solidarité"
Condamné à une amende en première instance à Nice début 2017, puis à quatre mois de prison avec sursis en appel à Aix-en-Provence, il avait saisi les Sages, via deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), sur le "délit de solidarité" dont il s'estimait victime.
"Une aide désintéressée aux migrants, qu'elle soit individuelle ou militante et organisée, ne doit pas être poursuivie", tranchait alors le Conseil constitutionnel, soulignant "la liberté d'aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national".
Fin 2018, la Cour de cassation retenait ce "principe de fraternité" pour annuler la condamnation et ordonner un nouveau procès devant la cour d'appel de Lyon.
Le 11 mars dernier, le parquet général réclamait, lui, "huit à dix mois" de prison avec sursis, la peine la plus lourde jamais requise à l'encontre du prévenu.
L'avocat général estimait que l'action de M. Herrou "n'avait pas un but exclusivement humanitaire mais une revendication idéologique, militante".
"L'immunité ne peut pas s'appliquer. Il a fait le choix d'être, au sens propre du terme, un hors-la-loi" ajoutait-il.
Une vision que n'aura pas partagé la cour d'appel, l'agriculteur étant "renvoyé de toutes les poursuites" engagées à son encontre.
Les juges l'ont également dispensé de peine pour avoir occupé sans autorisation les locaux abandonnés de la SNCF.