Les deux propriétaires successifs d’un local insalubre de 12 mètres carrés, situé dans la cave d’un immeuble du centre-ville de Marseille, ont été condamnés lundi à de la prison ferme pour avoir soumis une personne vulnérable à des conditions de logement indignes.
Le tribunal a exigé que la partie ferme de leur peine soit purgée sous bracelet électronique, à domicile.
D’abord détenu par un retraité, puis par son gendre à partir de 2020, ce local exigu, éclairé uniquement par un vasistas donnant sur le trottoir, était loué pour 380 euros par mois.
Les toilettes, dont les photos choquantes avaient été diffusées lors de l’audience du 3 février, étaient installées au pied d’une gaine technique, exposant les occupants de l’immeuble à une vue directe sur cet espace insalubre depuis des fenestrons.
Le locataire, bénéficiaire du RSA, vivait depuis 2014 dans ces conditions, subissant régulièrement des dégâts des eaux et une invasion de nuisibles.
Les deux propriétaires ont été respectivement condamnés à 18 mois de prison, dont six avec sursis, et 12 mois, dont six avec sursis. Ils devront restituer au locataire l’intégralité des loyers perçus depuis 2018, soit environ 8.000 euros, et chacun devra lui verser 3.000 euros en compensation du préjudice moral.
"Je vivais comme une bête sauvage", a témoigné le locataire, qui était sans domicile fixe lorsqu’il a accepté ce logement "par nature impropre à l’habitation", selon les termes du tribunal.
L’ancien propriétaire et son gendre, qui avait acquis le bien en 2020 pour 24.000 euros, "ont exploité la vulnérabilité de leur locataire et n'ont pas manifesté de prise de conscience à l'audience", a souligné la présidente du tribunal, Margaux Kennedy, leur reprochant d’avoir voulu "percevoir des loyers au détriment de la dignité humaine".
En plus de la peine de prison, chaque prévenu a été condamné à une amende de 15.000 euros. Le tribunal a également ordonné la confiscation immédiate du bien immobilier et interdit aux deux hommes d’acquérir un logement destiné à la location pendant cinq ans.
Le retraité, qui possédait jusqu’à une vingtaine de biens immobiliers au milieu des années 2010, s’était présenté comme "un bailleur social" : "Je choisissais toujours des personnes en difficulté plutôt que de prendre des personnes avec de l’argent", s’était-il défendu.
Son gendre, chauffagiste, avait tenté de justifier son comportement en évoquant une proposition de relogement, mais à un loyer inabordable pour son locataire.
Partie civile, la ville de Marseille a obtenu 500 euros en réparation de son préjudice moral. Son avocat, Me Jorge Mendes Constante, s’est réjoui de cette décision, rendue huit jours après la condamnation d’un autre marchand de sommeil à trois ans de prison, dont un an avec sursis probatoire.
"Les décisions rendues sont sévères et les marchands de sommeil qui se cachent encore doivent le savoir : la justice arrive et le temps de l’impunité est terminé", a-t-il déclaré à l’AFP
(Avec AFP)