La ficelle est tellement grosse que, pour l'instant, personne ne s'est avancé pour la tirer. Vendredi soir, nos confrères du Figaro révèlent en exclusivité le sondage de la peur : d'après leurs informations, une étude commandée par la République en Marche (LREM) à Opinionway sur les régionales en Provence-Alpes-Côte-d'Azur donne le Rassemblement national vainqueur.
Il était plutôt assuré que le parti frontiste, mené par l'ex-UMP Thierry Mariani, a de fortes chances d'arriver en tête du premier tour. En 2015, Marion Maréchal-Le Pen avait dépassé les 40%. Mais aucune étude n'avait donné le RN national gagnant jusqu'à présent. Plus que l'issue elle-même, c'est la configuration dans laquelle cette victoire serait garantie qui a semé le doute.
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Même si les Républicains et LREM faisaient alliance, le résultat serait serré, toujours d'après le sondage. Et pas de doute, comme le souligne le quotidien de droite : « si les macronistes se maintiennent, ils arriveraient non seulement bons derniers de la quadrangulaire (du second tour), mais ils favoriseraient surtout une victoire du RN, qui remporterait la région avec une confortable avance ». Le message semble clair : la voie est libre pour annoncer un accord, au nom du principe de responsabilité et du "front républicain".
"Intox"
"LREM se sachant perdue dans la région Sud commande un sondage bidon et non chiffré (Le Figaro ne révèle pas les chiffres d'Opinionway, NDLR) pour faire croire à la victoire de l’extrême-droite sans fusion avec LR ! a commenté le maire LR de Villeneuve-Loubet Lionnel Luca, en réponse à notre premier article. Au tour maintenant des LR compatibles de prendre le relais de l’intox ! Plus c’est gros plus ça passe c’est bien connu !"
Toujours dans les commentaires de notre sujet, réplique de Thierry Mariani : "Cher Lionnel, quand j’écoute les déclarations répétées de Christian Estrosi pour soutenir Macron et que je lis certains tweets (de Renaud Muselier, président LR du conseil régional, NDLR) les pressions sur LR sont inutiles…le seul problème est comment cacher désormais une connivence évidente entre LR et LREM en PACA ?"
"C’est effectivement un secret de polichinelle…" a convenu l'élu villeneuvois.
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Opinionway, institut controversé
En 2007, déjà, le Parti socialiste pointait du doigt Opinionway et son travail "peu fiable" et "commandé". L'entreprise, très critiquée, s'en défend. Après la présidentielle, Ségolène Royal écrira d'ailleurs un bouquin où elle accuse l'institut d'évoluer main dans la main avec Le Figaro dans une stratégie de manipulation de l'opinion publique. En 2009, à l'occasion des européennes, c'est un sondage "clairement truqué", réalisé en "défi à toutes les règles" habituelles que le même institut dégaine. Depuis l'époque Sarkozy, il n'a toutefois plus fait parler de lui, et de grands médias lui font régulièrement appel.
Les sondages régionaux : à prendre avec des pincettes !
On ne connaît à peu près aucun détail de la fameuse enquête sur nos régionales. Ce que l'on sait, c'est que les études sur des scrutins locaux sont d'une manière générale à observer avec une certaine distance.
Quand, pour un scrutin national, l’échantillon de personnes interrogées peut comprendre 1.000 voire 1.200 individus, pour une élection municipale par exemple, on est plutôt sur un panel de 500 ou 600 personnes. Résultat logique ? La marge d'erreur peut s'élever à plus de 4 ou 5 points ! Alors quand Le Fig note que c'est « d’une très courte tête » que la droite battrait le RN en cas d'alliance avec le centre, on a tendance à sourire.
Il faut également savoir que pour atténuer cela, les instituts "redressent" souvent les résultats obtenus en fonction de ceux des élections précédentes. Pas très scientifique.
Les sondages effectués au téléphone posent également problème. Puisque les portables ne peuvent être géolocalisés dans ce cadre, ce sont les fixes qui sont souvent utilisés. Un biais évident.
Ça a fait parler
Dans les Bouches-du-Rhône, La Provence n'a pas relayé le sondage. Dans les Alpes-Maritimes, Nice-Matin non plus.
Il a toutefois alimenté les discussions des Azuréens ce week-end : d'après le réseau social, 844 commentaires ont été postés rien que sur Facebook à propos du papier du Figaro, 703 à propos de celui paru chez nous.