Villa de prestige, cinéma porno, haut-​lieu de culture… À Nice, le destin tourmenté de l'Idéal

Juste à côté de l'avenue Jean-​Médecin, se cachent des vestiges de ce qui était autrefois le Cinéma Théâtre Idéal. Fermé depuis une vingtaine d'années, ce lieu a laissé son empreinte avec sa façade Belle Époque.

Parfois, il suffit de lever les yeux pour se laisser surprendre. Le long de la rue Maréchal-​Joffre à Nice, juste en face de l'église orthodoxe russe, l'agence Voyageurs du Monde est implantée. Jusque là, rien d'anormal… C'est seulement en regardant un poil plus haut que vous pourrez découvrir une surface qui suscite quelques inter­ro­ga­tions : il s'agit de la façade de l'ancien cinéma théâtre Idéal. 

Mais alors quelle est son histoire ? On vous emmène faire un saut dans le passé accom­pagné par Christophe Prédal, respon­sable du Pôle recherche et inven­taire pour la Direction des Patrimoines communaux.

Retour dans les années 1860. Charles Garacci fait construire l'une des premières maisons, de type villa, dans ce secteur. "Ils ont quadrillé le quartier de rues bien après. Cette structure s'est donc retrouvée de biais par rapport au boulevard qui a été créé vers 1880".

En 1899, le bâtiment est surélevé de deux étages. "C'est là que les décora­tions de la façade, que l'on voit encore aujourd'hui, sont réalisées". Neuf ans après, une nouveauté survient avec une aile trian­gu­laire ajoutée en bas, du côté de la rue Maréchal-​Joffre. "Le permis de construire montre que des boutiques devaient y être installées, au rez-​de-​chaussée et au premier étage".

Mais finalement, changement de programme : au cours des travaux, ils décident d'y faire… un cinéma. "Ils excavent les appar­te­ments des premiers niveaux pour l'installer. Il est donc en partie dans la maison !"

Diverses utilisations

Le cinéma théâtre Idéal ouvre ses portes en 1908. "La structure prenait la majeure partie de la place avec juste quelques boutiques autour". Par la suite, la salle "a été moder­nisée, agrandie…" En 1912, l'architecte Jules Febvre dépose d'ailleurs un permis de trans­for­mation pour la Société Cinématographique de la Côte d'Azur.

En 1934, il devient le Studio 34. Pourquoi cette appel­lation ? "C'est une référence au studio 28 à Paris. C'était l'un des premiers cinémas d'art et d'essais, avec des films d'auteur, en langues étran­gères… À Nice, ils se sont donc placés sur ce créneau là également". 

Mais l'histoire du lieu ne s'arrête pas là. "En 1970, les cinémas perdent énormément de public, avec la télévision. Le Studio 34 se trans­forme alors en cinéma porno­gra­phique, avant de fermer en 2000". Depuis 2017, l'agence Voyageurs du Monde y a pris ses quartiers. Il est encore possible de découvrir les volumes d'antan, avec l'un des balcons latéraux et le mur de l'ancien écran qui sont encore visibles.