En haut du boulevard de la Madeleine, la Maison Alziari perpétue un savoir-faire rare, celui du dernier moulin à huile génois en activité dans les Alpes-Maritimes. À Nice, l’huile d’olive se fabrique comme il y a plus d’un siècle, à la pierre et à l’eau, selon une technique patiemment transmise…
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« J’ai commencé à venir ici en 1978 » raconte Robert Luminet, maître-moulinier de la maison Alziari depuis près de vingt ans. « J’étais professeur d’histoire-géographie. Et un jour, en venant presser mes olives, Monsieur Alziari m’a formé. Quand j’ai pris ma retraite, je suis devenu officiellement « lou deficie » du moulin. »
Savoir-faire ancestral
Fondée en 1868, la Maison Alziari a vu se succéder les générations, du fondateur César Martin à la famille Alziari, jusqu’à son propriétaire actuel, la famille Piot. Dans l’atelier d’époque , mais restauré, tout se fait encore selon la méthode génoise. Les olives sont broyées sous une meule en pierre, puis l’huile remonte naturellement par différence de densité, grâce à l’eau, sans extraction mécanique.
« Nous travaillons pour les particuliers » précise Robert. « Ici, tout se fait comme avant. On retrouve le goût, la texture, la lente évolution. C’est un produit vivant. »

Les noyaux d’olives - les grignons - sont même conservés puis brûlés pour alimenter la chaudière. « On chauffe le moulin avec ce que l’on produit. Rien ne se perd. »
La tradition va jusqu’à l’attente. Une trituration dure trois à quatre heures, et beaucoup de Niçois viennent avec leur panier pour partager un casse-croûte à base de pain frotté à l’ail et d’huile nouvelle. « La brissaouda fait partie du rituel. On transmet le goût autant que le geste. »
Héritage menacé ?
Si le lieu fascine par son authenticité, il témoigne aussi des défis du moment. « La chaleur au printemps, le manque d’eau… Cette année encore, la production sera faible. On n’a jamais vu ça. »
À l’automne, il faut désormais compter sept à huit kilos d’olives pour obtenir un litre d’huile, contre trois à quatre kilos dans les années plus favorables.


Pour autant, l’attachement demeure. « Les fidèles reviennent, et les jeunes aussi. Ils veulent savoir comment c’est fait. Ils veulent de la vraie et bonne huile d’olive »
La Maison Alziari récolte aujourd’hui dans tout le pays niçois, du bas de la Madeleine jusqu’aux collines, et produit également à Contes pour sa gamme AOP. Au moulin génois, seule une très petite quantité est fabriquée. Celle des particuliers, et la fleur, la plus rare, la plus intense.
Une tradition qui, malgré les difficultés, continue de faire école dans tout le bassin. « Ce moulin fait partie de l’identité de Nice. On ne peut pas imaginer qu’il disparaisse. »



