Prix à la pompe, transition vers les énergies renouvelables, projets verts en Provence-Alpes-Côte d'Azur… On fait le point avec Isabelle Patrier, directrice France de TotalEnergies, en visite à Nice le 29 septembre.
Nice-Presse - La métropole de Nice et la Région Sud sont-elles véritablement des collectivités modèles au niveau de la transition énergétique ?
Isabelle Patrier - Il y a des territoires qui ont une vision, une trajectoire sur le sujet, et qui tiennent leurs objectifs. Ici, dans le Sud, il y a de vraies ambitions. En Provence-Alpes-Côte d'Azur, on voit beaucoup de projets, du côté du conseil régional mais aussi, et je veux le dire, des industriels qui ont cette volonté, et qui mettent les moyens pour décarboner.
Le président de Nice-Côte d'Azur, Christian Estrosi, estime que la transition se joue d'abord à l'échelon local. D'accord avec lui ?
Bien sûr, l'énergie de demain sera de plus en plus locale. Quand vous développez, par exemple, une ferme solaire, vous êtes dans les territoires, pas dans une énorme usine qui couvrira la moitié du pays.
Les collectivités n'ont pas la main sur bien des choses, puisqu'elles sont confrontées au millefeuille administratif. La décentralisation qu'évoque Christian Estrosi est peut-être une solution. Moi, je constate que nous sommes très, très en retard sur ce que nous devons faire, à cause de ces lenteurs.
Que cela soit l'État, ou les régions qui prennent en main les dossiers, l'enjeu, c'est le dialogue avec le citoyen, pour qu'il s'approprie le développement des énergies bas-carbone.
Vous évoquiez l'an passé dans nos colonnes l'installation de bornes de recharge, et la solarisation des ombrières des parkings. Ça avance ?
On a aujourd'hui 18 000 bornes de recharges, beaucoup dans le Sud. Nous progressons aussi sur le sujet des ombrières. Nous avons récemment pu solariser celles d'une société de transports dans une commune des Bouches-du-Rhône.
Nous avons installé 18 bornes haute-puissance - qui permettent de charger son véhicule en 20 minutes - du côté de la station Côte d'Azur de Mougins : systématiquement, nous installons des panneaux solaires. À l'État, aussi, de nous délivrer toutes les autorisations, évidemment.

Les avions deviennent un brin impopulaires, par chez nous. Vos actions pour les biocarburants y changeront-elles quelque chose ?
Ce que je peux vous dire, c'est que nous avons annoncé avant l'été l'ouverture prochaine d'une usine de biocarburants aériens en Seine-et-Marne, dans une raffinerie arrêtée en 2021, et qui datait de 1967. Nous en faisons une plateforme zéro-pétrole, qui sera aussi la plus grande ferme solaire de cette région.
Les compagnies aériennes sont-elles assez demandeuses ?
Bien sûr, elles réclament toutes aujourd'hui du SAF (un carburant alternatif issu de matières premières durables, ndA), ce n'était pas le cas il y a cinq ans ! Les grandes compagnies aériennes et l'aviation d'affaires m'ont l'air très motivées.
Quelles sont vos ambitions pour le site provençal de La Mède, l'une des plus grandes raffineries internationales de biocarburants ?
Elle tourne depuis 2019. Après son arrêt en 2024, nous fonctionneront en 100 % huile alimentaire usagée et graisse animale. Nous y développons notre grand projet lié à la production d'hydrogène vert massif, à 120 mégawattheure. Ce site est notre vitrine européenne.
Vos autres projets en région Sud ?
Nous venons d'annoncer l'acquisition de la startup de l'agrivoltaïsme (associer l'électricité photovoltaïque et la production agricole sur un même site, ndA) Ombrea, née à Aix-en Provence. Cette ville devient notre "hub d'expertise" dans le domaine. Les équipes d'Ombrea et celles de TotalEnergies y travailleront de concert. Nous devons produire de l'énergie, avec des gains pour le bien-être animal, la biodiversité, et un partage de la valeur pour l'agriculture.
34 sites de production d'énergies renouvelables chez nous l'an passé, et à présent ?
40 ! Comprenant la plus grande ferme solaire équipée de trackers - le système qui va chercher le meilleur rayonnement - installée sur 49 ha à Fos-sur-Mer.
Il y a une différence de 9 centimes au litre entre les stations TotalEnergies, et celles de certains supermarchés. Parce que vous pourriez en faire davantage pour le pouvoir d'achat des Français, mais ce n'est pas votre choix ?
Depuis février 2023, nous étions les seuls à plafonner les prix à 1,99 euros. Nous soutenons le pouvoir d'achat grâce à nos résultats à l'étranger. Nous affectons ces ressources en France avec ce plafonnement, mais aussi en investissant dans la transition énergétique. Nous n'avons pas tout fléché vers le prix à la pompe, mais aussi vers les mobilités de demain.
Pourquoi embauchez-vous des centaines de pompistes dans vos stations ?
Tout simplement pour recréer du lien social avec les clients, qui avait été perdu. Nous replaçons de l'humain au cœur des territoires. 200 pompistes aujourd'hui, 300 dans les mois qui viennent, dans les campagnes comme dans les grandes agglos.
Vous promettez d'ouvrir de nouvelles stations dans les zones rurales qui en manquent. Chez nous, où ça ?
Deux, dans les Bouches-du-Rhône et dans les Alpes-de-Haute-Provence. Nous en sommes à l'identification des sites. Le maillage est bon dans les Alpes-Maritimes, mais nous restons attentifs.