Les professionnels de l’immobilier et du bâtiment espèrent enfin tourner la page d’une crise profonde qui a durement frappé la construction neuve en France en 2024. Les grands groupes, contraints de faire le dos rond, attendent un redémarrage cette année.
"2024 est la pire année depuis plus de 50 ans et le début de nos statistiques", résume Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers, auprès de l’AFP.
L’an dernier, seuls 59.000 nouveaux logements ont été mis en vente par les promoteurs en France, soit une chute de moitié en seulement deux ans, illustrant l’ampleur de la crise qui secoue l’immobilier neuf. Hors période du Covid, la moyenne annuelle des mises en vente entre 2017 et 2022 s’élevait à environ 125.500 logements.
Sur l’ensemble de 2024, 330.400 logements ont été autorisés à la construction, soit une baisse de 12,3 % par rapport à 2023 – déjà une année morose – et un recul de 28 % comparé aux douze mois précédant la crise sanitaire.
Le promoteur Nexity, particulièrement exposé, a dû réduire ses effectifs et adapter son organisation. Son chiffre d’affaires a chuté de 17 %, s’établissant à 3,5 milliards d’euros, tandis qu’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) a entraîné la suppression de 500 postes.
Les grands groupes du BTP, bien que moins durement touchés, ont également subi des ajustements. Leur résilience tient en grande partie à leurs autres domaines d’activité, notamment les infrastructures, l’énergie et les centres de données, qui restent des moteurs de croissance.
Chez Bouygues, la crise s’est traduite par la suppression de 225 postes, avec une centaine de reclassements en interne. Vinci a également réduit ses effectifs d’environ 150 postes.
"Bouygues Immobilier s'est adapté à une nouvelle configuration du marché et est prêt à accompagner le redémarrage lorsqu'il se produira. Reste à savoir si ce sera en 2025 ou plus tard", a déclaré jeudi Olivier Roussat, directeur général de Bouygues.
"Vinci Immobilier est toujours confronté à une crise très sérieuse, mais il existe peut-être quelques facteurs d’espoir", avait confié Xavier Huillard, PDG du groupe, lors de la présentation des résultats annuels début février.
Le secteur du bâtiment reste sous tension, mais certains industriels, comme l’équipementier Legrand, parviennent à compenser la baisse d’activité grâce à leur positionnement sur d’autres marchés, notamment les centres de données. Son directeur général, Benoît Coquart, estime toutefois que la sortie de crise ne surviendra pas avant la fin 2025.
"Le bâtiment neuf va continuer de souffrir. En revanche, le nombre de transactions immobilières devrait repartir à la hausse", a-t-il déclaré mi-février. "Il pourrait donc y avoir une amélioration du marché, mais elle sera progressive et attendue plutôt vers la fin 2025 que dès le début de l’année."
Quel que soit le rythme de cette reprise, il reste une certitude : "On manque de logements en France", insiste-t-il. "À un moment ou un autre, il faudra nécessairement construire ou entreprendre des rénovations lourdes pour répondre aux besoins."
Après deux années de crise, Véronique Bédague, PDG de Nexity, entrevoit également des signes encourageants en 2025. Elle évoque "une amélioration du contexte macroéconomique, avec la baisse des taux directeurs de la banque centrale, qui se traduit par une réduction significative des taux d’intérêt des crédits immobiliers". Cette évolution devrait mécaniquement renforcer le "pouvoir d’achat immobilier".
Elle note également "une stabilisation des coûts des travaux" ainsi que des mesures budgétaires favorables au logement neuf adoptées par l’État.
Optimiste pour 2025, Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers, alerte néanmoins sur un risque potentiel : un redémarrage trop rapide du marché pourrait entraîner une nouvelle flambée des prix.
(Avec AFP)