MÉDIAS — “Informer n’est pas un délit” comme le revendique le collectif de reporters éponyme depuis des années contre les pressions autocrates en tout genre. Le message n’est, semble-t-il, pas arrivé jusqu’à Nice. D’après nos informations ce lundi 22 juin, le candidat EELV-AEI à la mairie de Nice Jean-Marc Governatori a porté plainte contre “Nice-Matin” après la parution d’une enquête sur un appartement insalubre qu’il aurait mis en location.
On apprenait ainsi dans ce papier publié le 29 février que le candidat aurait participé à la mise en location d’une cave insalubre pendant plusieurs années. Sa locataire, une femme dans une situation de grande précarité, habitant avec quatre enfants en bas âge, a signalé aux autorités “des menaces”, qu’elle attribue, notamment, à M. Governatori.
“L’appartement” en question, situé à Beausoleil, rongé par la moisissure et l’humidité, avait été déclaré “impropre à l’habitation” par le préfet des Alpes-Maritimes. Les services de l’État avaient même alerté le propriétaire de risques pour la santé des locataires.
Municipales à Nice. Le week-end où les écolos ont fait de la presse leur cible numéro 1
Jean-Marc Governatori a expliqué “ne rien avoir à faire avec ces appartements” (même s’il reconnait en avoir signé le bail !), dont il se serait ponctuellement occupé de la gestion.
Si l’affaire n’était pas assez plombante comme cela pour la liste Nice Ecologique, celle-ci a accusé sur les réseaux sociaux “Nice-Matin” de “relayer des boules puantes” pour avantager le maire sortant Christian Estrosi, faisant un lien entre l’article et l’achat de publicité par la mairie dans les pages du quotidien.
Et depuis le 29 février… silence radio. À tel point que les journalistes autrices de l’enquête et la direction de “Nice-Matin” pensaient que cette plainte n’avait pas été déposée.
Sauf que, si, le candidat écolo poursuit bien en justice le principal quotidien de la ville, en pleine campagne électorale.
Dans le procès verbal que nous avons pu consulter (photocopie ci-bas), daté du 16 mars, nous avons donc confirmation que Jean-Marc Governatori a porté plainte pour “diffamation” contre les reporters.
“Cette plainte déposée, la saisie au Procureur, ainsi que toutes les pièces justificatives légitimant cette diffamation et l’absence d’implication du plaignant, sont effectivement actuellement en cours d’instruction et entre les mains de la justice, ce qui, vous le savez, interdit conformément à l’Article 11 du Code Pénal toute forme de communication sur ce dossier” indique-t-on du côté du candidat.
Par devoir de réserve pendant cet entre-deux-tours, le directeur des rédactions du groupe “Nice-Matin” Denis Carreaux a préféré ne pas commenter cette action en justice.
À l’AFP ce 22 juin, le candidat vert s’est plaint d’être “maltraité par la presse locale”. En coulisses, les propos des cadres et militants de Nice Écologique sont plus fleuris. Comme nous vous le révélions dans un papier du 3 mars dernier, sa liste s’est véritablement déchaînée contre les médias après cette enquête.
“Ils sont partis bille en tête sur l’idée d’un complot ourdi par la mairie et les journalistes de Nice-Matin, expliquait une source interne qui a contacté Nice-Presse. ‘Chiens d’Estrosi’, ‘laquais du pouvoir’ ou ‘vendus’ sont des termes que je n’aurais jamais cru entendre pour qualifier les médias dans la permanence politique d’une formation écolo…”
“Nice-Matin ne fait pas du journalisme en publiant cette enquête” avait enfoncé la numéro 2 de la liste, Juliette Chesnel-Leroux. Une conception très particulière de la liberté d’informer.
La rédaction de « Nice-Matin » poursuivie par un candidat aux municipales après la parution d’une enquête. @NicePresse dénonce un recul inacceptable et inquiétant de la liberté d’informer dans notre ville. Soutien.
👉 https://t.co/QDxuE1owdY#Nice #Nice06 #Municipales2020 pic.twitter.com/qMV5DHE4tD
— Clément Avarguès (@ClementAvargues) June 22, 2020