Plusieurs locataires d'un HLM niçois, soutenus par la députée du secteur, se disent "humiliés" par leur bailleur. Côte d'Azur Habitat, qui n'a pas voulu répondre à nos questions, conteste.
Isabelle fait face à la petite foule de journalistes, vendredi 25 novembre. Vingt-six ans qu'elle occupe un logement social dans le HLM Les Sagnes, à Nice-Ouest. Depuis 2019, elle a créé un collectif de locataires pour dénoncer leurs conditions de vie.

Le toit des halls d'entrée ont des trous qui laissent passer le jour. Un morceau de souris morte est coincé dans la porte de l'ascenseur. Le sous-sol empeste. Pendant notre visite, un panneau de bois est placé devant le trou béant d'un mur d'escalier. La plaque tombera dix minutes plus tard. Maigre cache-misère…

Intimidée par la caméra de télévision et les questions, Isabelle tient à deux mains un gros dossier de feuilles éparses. "Regardez, on a contacté le maire, le préfet… Rien n'y a fait".
"La situation est dramatique. On a vu des rats dans des lits de bébés. Ce que l'on dénonce est bien visible, mais rien ne bouge" pointe-t-elle. Plus émue qu'énervée.
"On a l'impression d'être des 'rien du tout', on ne prend pas soin de nous. Nous sommes humiliés".


Marie, la quarantaine, nous fait entrer dans son appartement. Un taudis. Le grand mur du salon est bouffé par les marques de moisissures. La pourriture a gagné un pan entier des sanitaires.

On voit peu l'extérieur depuis ce logement : une autre tour de béton a été construite devant ses fenêtres. L'odeur prend à la gorge.
"Je suis asthmatique, alors c'est pour moi encore moins évident que pour vous" détaille Marie. "Ma fille, enceinte, a dû partir d'ici. Je ne sais pas quand elle pourra de nouveau venir me voir".
"Je ne lâcherai rien"

Pendant sa campagne électorale, l'avocate maralpine Christelle d'Intorni a médiatisé le dossier. Les législatives remportées, la désormais députée Les Républicains est revenue sur place, voir les habitants.
Elle a aussi saisi l'Agence de santé, et la préfecture, comme elle l'expliquait dans Nice-Presse le 18 novembre. Dans un courrier, Côte d'Azur Habitat a annoncé "envisager d'engager des poursuites" contre elle.
"Cela ne m'intimide pas, je ne dévierai pas de cap" répond l'intéressé. "Et si le bailleur s'occupait de ces Niçois plutôt que de gaspiller l'argent public contre moi?"
Sollicité à plusieurs reprises, Anthony Borré, président de Côte d'Azur Habitat et premier adjoint de Christian Estrosi chargé du logement, n'a pas souhaité échanger avec Nice-Presse.
Ce que répond Côte d'Azur Habitat

Le bailleur nous avait, avant cela, transmis le 23 novembre une copie de la lettre de son avocate, envoyée à la députée d'Intorni.
Ainsi, Côte d'Azur Habitat assure mettre les moyens dans le nettoyage quotidien des Sagnes (31.000 euros par an), dans des opérations de dératisation (dont l'une est en cours, pour trois mois) et dans le remplacement des colonnes collectives de la résidence. 130.000 euros auraient déjà été mobilisés. CAH met également en avant l'ancienneté de l'ensemble, bâti dans les années 1960.
Pour ce qui est du cas précis de l'appartement de Marie, elle serait suivie par ses services, qui attendent "le complet séchage des murs impactés par des dégâts des eaux pour pouvoir intervenir".
Pour ce qui est d'un réel chantier de réabilitation de résidence, "il nécessite des budgets exceptionnels".
Après une réunion publique organisée le 15 novembre, "des études seront menées" début 2023, avant le lancement de travaux en fin d'année. Il est ainsi promis une réfection complète des parties communes et halls d'entrée, une nouvelle isolation ou encore un ravalement de façade, pour "plusieurs millions d'euros".
Au sujet des signalements effectués par Christelle d'Intorni, Côte d'Azur Habitat estime que la députée monte en épingle "des désordres isolés".