Partie 1/2 - Le théâtre national fait sa rentrée dans Nice-Presse. Rencontre avec sa directrice depuis 2019, Muriel Mayette-Holtz.
Premier été du TNN aux Arènes de Cimiez : quel bilan en tirez-vous ?
J'en suis très fière. Nous avons réussi à nous emparer d'un lieu magistral. C'est un écrin pour le théâtre, cela montre la véritable colonne vertébrale de ce projet, malgré les craintes de certains. Il n'y a pas eu de nuisances pour les riverains.
Certains spectateurs trouvent que le lieu est trop peu accessible, bruyant et qu'on y est mal assis. Qu'allez-vous améliorer ?
C'était un galop d'essai, nous avons fait des tests, en ne reprenant pas la configuration du Nice Jazz Festival (qui s'y déroulait il y a dix ans, ndlr). Toutes les critiques sont entendues. Pour l'installation finale, je vous donne rendez-vous en 2025.

À quoi faut-il s'attendre ?
Les sièges seront changés pour des assises plus confortables, la technique placée en hauteur pour accueillir davantage de spectateurs, et un appareillage sonore plus sophistiqué sera proposé.
"Trop éloignée du centre, laide et pas assez accueillante, dans un quartier peu équipé en bars et restaurants"… La salle de la Cuisine, aux Moulins, ne fait pas l'unanimité. C'est même un "chapiteau sur parking" d'après le député Eric Ciotti. Que pensez-vous de ces critiques ?
Je ne m'intéresse pas aux gens qui critiquent sans jamais mettre les pieds au théâtre. C'est juste de la polémique, du n'importe quoi au coeur d'une bataille qui ne me concerne pas.
Pour autant, je réponds aux réserves des spectateurs. Je suis une enfant du service public voyez-vous, donc je trouve que le quartier des Moulins devait bénéficier de cet équipement. Les habitants de la Plaine du Var sont ravis, ceux qui prennent le tramway aussi.
Je vous annonce par ailleurs que La Cuisine sera ouverte, d'ici octobre 2023, le midi et le soir, pour accueillir les riverains et les salariés du CADAM qui pourront dorénavant y déjeuner, s'approprier le lieu.
Ceux qui préfèrent rester dans le centre auront une grande salle, dans quelques années, au coeur de l'actuel palais des expositions.
Quand ? Et qu'y trouvera-t-on, dans ce palais ?
Une salle contemporaine, complémentaire de celle, plus petite, des Franciscains. Elle sera parfaitement confortable. À l'allemande, elle sera assez large pour pouvoir monter de grands décors. Nous aurons une salle pour les répétitions, un bar-restaurant et un atelier de construction. Le tout, accessible par la T1. L'inauguration est prévue en 2028 (en retard de plusieurs années, ndlr). À terme, nos équipements seront d'une qualité supérieure, comparée à celle du bâtiment détruit.
Dans d'autres villes, comme à Lyon, les institutions culturelles ont parfois été lâchées par des collectivités. Êtes-vous assez soutenus, à Nice ?
Nous sommes extrêmement privilégiés dans cette région, et particulièrement à Nice. Si on peut reprocher des choses à la politique culturelle, j'ai avec moi une mairie confiante, qui est au rendez-vous, tout comme le conseil départemental des Alpes-Maritimes.
L'opposition dénonce, au sujet du théâtre et de l'opéra, une "culture pour quelques-uns". Que répondez-vous ?
Qui ne fait rien n'est pas critiqué. Je ne suis pas fermée aux opinions contradictoires, elles nous font parfois évoluer. Mais tout cela ne me déconcentre pas. À l'arrivée, c'est le public qui a raison.
Vous programmez cette saison "Gisèle Halimi, une farouche liberté". Elle n'a pas eu droit à sa rue chez nous, puisque le conseil municipal estime qu'elle est "trop polémique". Vous le regrettez ?
Je le regrette à 200 % ! Je ne me suis, parfois, pas sentie légitime en assumant certaines fonctions. Elle a été d'une grande aide. Quand je dirigeais la Comédie Française, c'est elle qui m'a fait transformer le terme "administrateur" en "administratrice". "Le jour où on a pu dire 'étudiante', le monde a changé" m'a-t-elle rappelé. Je lui dois beaucoup. Elle a donné une confiance aux femmes, qui en ont besoin dans ce combat pour l'équité.
Cet été, une enquête de Libération mettait en cause votre management des équipes. Cela vous conduit-il a changer votre organisation en cette rentrée du TNN ?
Non, nous n'avons absolument rien modifié, ça n'a rien changé. Travailler dans une ambiance sereine est pour moi quelque chose de fondamental. Tout le monde doit se sentir bien ici. Je suis une fille de troupe. S'il y avait des problèmes ici, ils seraient dénoncés par moi-même en premier.