Un rapport épingle le Centre de gestion des Alpes-Maritimes, qui, malgré sa bonne santé financière, aurait mené un encadrement contestable de certains fonctionnaires pendant plusieurs années. Un élu niçois d'opposition a saisi le procureur de la République. Le CDG se défend.
JUSTICE — Le rapport de la Chambre régionale des comptes est extrêmement sévère. Selon l'autorité de contrôle, la gestion du CDG06, chargé d'encadrer les fonctionnaires du département et actuellement présidé par Christian Estrosi, laisserait franchement à désirer. Dans le viseur des experts : des rémunérations "irrégulières", des privilèges indus et des recrutements "douteux" entre autres lacunes. Le document porte sur l'exercice 2013-2019.
Le conseiller municipal d'opposition au conseil municipal de Nice Jean-Christophe Picard a annoncé saisir le procureur de la République, pour des faits "qui seraient susceptibles d'être qualifiés sur le plan du pénal". Contacté par Nice-Presse, Christian Estrosi, président depuis 2015 mais "pas concerné", n'a pas souhaité réagir.
L’organisme chargé de la gestion de ressources humaines pour 190 communes et établissements des Alpes-Maritimes se défend auprès de Tribune Bulletin Côte d'Azur en parlant de "généralisation excessive".
Ce qui est reproché
LES INDEMNITÉS IRRÉGULIÈRES. Christian Estrosi a dû renoncer à son indemnité de fonction de président en exercice, puisqu'il avait déjà atteint le maximum fixé par la loi. Normalement, le montant de cette rémunération devait être reversé au budget de fonctionnement du CDG 06. D'après le rapport, en réalité, il a été distribué aux différents vice-présidents de l'organisme.
"En conséquence, au lieu de percevoir seulement 803 euros par mois, le 1er vice-président percevait 2.677 euros tandis que les 2e, 3e et 4e vice-présidents touchaient 1.070 euros" souligne l'élu niçois Jean-Christophe Picard. À noter que ces sommes, qui ont l'air basses, se cumulent avec les autres indemnités d'élus de ces personnalités. Le Chambre régionale des comptes a demandé au CDG 06 de "mettre un terme à cette redistribution irrégulière."
LES VOITURES DE FONCTION. "La Chambre a relevé plusieurs anomalies, (dont) un système laxiste de mise à disposition permanente des véhicules du parc automobile (28 voitures) au bénéfice de certains personnels."
En clair, le rapport pointe une utilisation déplacée des voitures de fonction dont dispose le CDG06, préconisant la mise en place d'une "gestion contrôlée et rigoureuse".

LES RECRUTEMENTS DOUTEUX. L'audit accuse également le CDG 06, à travers "quelques situations individuelles" d'avoir procédé à de "sérieuses irrégularités en termes de recrutements", de rémunération et "d’avancements de carrière".
Particulièrement critiqué, le recrutement "dispensable" de Pierre-Paul Leonelli comme directeur de cabinet du président du CDG 06, payé environ 6.500 euros chaque mois depuis 2015. La Ville de Nice précise que Christian Estrosi n'était pas président du CDG au moment où M. Leonelli, proche du maire à ce moment-là, a été recruté. Avant 2015, le Centre étant effectivement dirigé par le sénateur José Balarello, jusqu'à son décès.
La Chambre dénonce également "un mélange des genres regrettable" alors que plusieurs élus du conseil municipal de Nice ont également été salariés pour diverses fonctions au CDG.
Tout en enfonçant le clou : "La réalité-même d’un travail effectif à temps plein demeurant, dans (certains) cas, plus que douteux".
"Doutes" qui ont été transmis au préfet et au directeur départemental des finances publiques.
La réponse du CDG 06 : "L'Établissement est bien géré"
LA RÉPONSE GÉNÉRALE. Le CDG 06 a assuré "qu’il tirerait toutes conséquences des recommandations" de la Chambre des comptes.
D'après le directeur général du CDG06, le rapport de la CRC PACA relatif à l’exercice 2013-2019 "ne saurait être considéré comme épinglant quant à la gestion de l’Établissement" mettant en avant des passages dudit rapport qui soulignent que "l’exercice des missions rendues aux adhérents apparaît en lui-même globalement exempt de critiques (…)"
"La CRC a constaté notamment que la charge d’intérêt de la dette, nulle jusqu’en 2014, demeure extrêmement faible, (…) son niveau n’est que de 0,3 % en 2017. La CRC PACA constate également que la trésorerie du CDG 06 atteint 813.000€ en 2017, ce qui correspond à 43 jours de charges courantes. Il s’agit là d’un ratio considéré comme satisfaisant au sein des juridictions financières (…) On est donc en présence d’une bonne gestion financière. (…) L’Etablissement est bien géré."
SUR LES INDEMNITÉS. "Le CDG 06 est en désaccord avec le raisonnement de la CRC, le dispositif utilisé, suite à la renonciation par le président Estrosi à ses propres indemnités, étant parfaitement conforme à la loi."
"De même, la gestion des ressources humaines ne constitue en aucune façon 'un point noir', s’agissant de critiques techniques liées à l’organisation générale du temps de travail, aux modalités techniques d’attribution de primes au profit du personnel. Il en va de même du contrôle du parc de gestion des véhicules automobiles."