La loi va-t-elle (enfin) être suffisante pour contrer la dramatique hausse du nombre de féminicides ?
C’est en tout cas ce qu’espère le gouvernement avec la présentation d’un nouveau texte à l’Assemblée ce mardi 28 janvier.
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2019 a été une année particulièrement meurtrière pour les femmes, avec au total 149 féminicides recensés. C’est deux fois plus qu’il y a deux ans.
On estime que plus de 220.000 femmes sont victimes physiquement de leur conjoint ou de leur ex-compagnon chaque année en France.
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Le “Grenelle des violences conjugales” d’automne dernier a débouché sur un certain nombre d’actions : le numéro d’urgence 39 19 ouvert sans interruption, la généralisation du bracelet anti-rapprochement — qui devrait être effectif courant 2020 — ou encore la formation systématique et la prise en charge des gendarmes et policiers face aux femmes victimes de violences conjugales.
La levée du secret médical en cas de danger immédiat suscite des réticences
Le texte prévoit que le secret médical pourra être levé lorsque le professionnel de santé “a l’intime conviction que la victime majeure est en danger immédiat et qu’elle se trouve sous l’emprise de l’auteur”.
Le médecin aura le devoir de “s’efforcer d’obtenir l’accord de la victime” ou, à défaut, de “l’informer du signalement fait au procureur de la République”.
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Le communiste Stéphane Peu a mis en garde l’exécutif : “Un signalement contre l’avis de la patiente pourrait mettre en danger la femme et ses enfants s’ils ne sont pas immédiatement protégés”, tandis que des élus PS, déplorent un texte qui “ne révolutionne pas grand-chose”.
Quant à certains élus, ils regrettent l’absence de dispositions concernant les couples de même sexe dans la proposition de loi sachant que 15% des gays et lesbiennes sont victimes de violences conjugales, comme le relève Têtu.
La secrétaire d’État Marlène Schiappa a fait face aux inquiétudes des différents partis politiques :
“Je sais que la question du secret médical a pu soulever beaucoup d’inquiétudes et d’interrogations”, mais “chacune et chacun doit pouvoir intervenir pour protéger les victimes de violences” et pouvoir ainsi “sauver” des vies.
LREM insiste sur sa collaboration avec l’Ordre des médecins dans l’écriture de l’article sur le secret médical.
Des peines plus lourdes en cas de harcèlement
La violence passe aussi par les mots. La proposition de loi prévoit d’alourdir les peines en cas de harcèlement au sein du couple. Elles seraient portées à dix ans d’emprisonnement et 150.000 euros d’amende lorsque le harcèlement conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider.
Chez Slate, Yael Mellul, ancienne avocate et présidente de l’association Femme et libre, a vivement plaidé pour une action plus forte afin que les suicides forcés ne restent pas impunis.
“En réalité, il faudrait parler de ‘mortalité liée aux violences conjugales’: dedans, il y a les meurtres, les assassinats, les homicides involontaires et les suicides forcés. Ces derniers doivent être considérés comme des féminicides”.
La question de la saisie des armes au domicile dès le premier dépôt de plainte est également concernée. Dans plus de 30% des féminicides, le conjoint ou ex-conjoint utilise une arme blanche ou une arme à feu.