Cinq ans après, on fait le point sur ce que nous savons de l’attentat de la Promenade des Anglais. Le procès ne s’est pas encore tenu, alors que des zones d’ombre persistent sur les motivations réelles du tueur et sur les responsabilités de ses éventuels complices.
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14 juillet 2016, 22h30. 30.000 personnes sont réunies sur la promenade des Anglais. Dans la foule, des femmes, des hommes, des enfants. Tous admirent le feu d’artifice qui éclate dans le ciel de la baie des Anges.
Les fumées du bouquet final viennent à peine de s’évaporer dans la nuit. Il est 22h33, le camion blanc conduit par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel fonce droit vers le trottoir. Il fauche férocement toutes les personnes qui se trouvent sur son passage.
Après quatre longues minutes d’une course effrénée, il est finalement neutralisé par la police. Le Tunisien de 31 ans vient d’assassiner sauvagement 86 personnes, de 19 nationalités différentes, et d’en blesser plus de 400 autres.
Cinq ans après, Nice n’oublie pas et la ville rend hommage aux Anges de la Promenade des Anglais.
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L’enquête a été clôturée le 30 avril 2020, quatre ans après les faits.
Endri E., un Albanais de 28 ans soupçonné d’avoir fourni des armes à Mohamed Lahouaiej Bouhlel, a été arrêté par la police italienne près de Naples, apprenait-on en avril dernier. Il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt européen émis par la justice française.
Qui sont les accusés ?
L’assaillant étant mort, l’enjeu du procès sera de répondre à la question de la complicité de ses proches : avaient-ils connaissance de son projet terroriste ?
Au départ, ils étaient neuf à être soupçonnés soit de complicité, soit “d’association de malfaiteurs terroriste criminelle” dans cette enquête. Mais Aleksander H., se suicide dans sa cellule à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis le 8 juin 2018 lors de se détention provisoire. Il était soupçonné “d’avoir apporté une aide logistique à Mohamed Lahouaiej Bouhlel”.
Trois hommes, Chokri C., Mohamed G. et Ramzi A. sont suspectés d’avoir communiqué avec le tueur avant l’attaque. Ils seront jugés pour association de malfaiteurs terroriste criminelle devant la cour d’assises spéciale de Paris. Eux démentent avoir eu connaissance du dramatique dessein. Ce sont les principaux accusés.
Mohamed Ghraieb a été libéré en 2019 sous contrôle judiciaire et les deux autres sont en détention provisoire.
Pour les autres suspects, les enquêteurs n’ont pu démontrer qu’ils avaient eu connaissance du projet d’attentat. Ils ne seront donc jugés que pour des infractions de droit commun.
Au moins 865 personnes ou associations sont parties civiles dans le procès.
Le tueur en contact avec l’EI ?
C’est une question qui est beaucoup revenue lors de l’instruction. Mohamed Lahouaiej-Bouhlel était inconnu des services de renseignement. Aucun acte d’allégeance à l’État Islamique, ni de preuve de son appartenance à ce groupe n’a été trouvée pendant l’enquête.
Des témoins le décrivent comme peu religieux, même si les investigations ont révélé qu’il possédait un certain “attrait” pour l’islamisme radical. Attrait qui s’est particulièrement intensifié deux semaines avant les faits.
Le matin du 16 juillet, l’État islamique revendique pourtant l’attaque via Telegram. Lahouaiej-Bouhlel est qualifié de “soldat” par l’organisation.
En 2019, Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme, affirme dans le “Journal du dimanche” être en mesure de confirmer qu’un lien existe entre Daesh et l’attentat de Nice, selon les forces kurdes en Syrie.
Les familles des victimes
En attendant l’arrivée du procès, elles poursuivent leur combat pour la vérité. L’association La Promenade des Anges, via son avocat maître Jérémie Assous, a d’ailleurs affirmé que “les autorités sont responsables. Que les juges d’instruction et les procureurs ont tout fait pour que la responsabilité des autorités ne puisse pas être mise en cause. Ils ont assumé leur choix de ne pas rechercher leur responsabilité puisqu’ils ont considéré que ça ne faisait pas partie de leur mission.”
Un expert judiciaire a réalisé un rapport sur les circonstances de l’attentat, dont les conclusions ont été révélées par voie de presse pendant l’été 2020 (notamment dans L’Obs). Il affirme que la course du camion de 19 tonnes n’aurait pas pu être stoppée par les jardinières ou les plots en béton. Ces dispositifs n’ont pas été mis en place le soir du 14 juillet 2016.
Suite à cela, plusieurs familles de victimes ont demandé une nouvelle expertise plus poussée sur les dispositifs de sécurité et les conditions dans lesquelles les faits se sont déroulés.
Quand aura lieu le procès ?
Le 9 novembre 2020, les magistrats instructeurs donne une qualification terroriste au procès.
Ce procès se tiendra devant la cour d’assises spéciale de Paris. Une décision que déplore les familles des victimes qui auraient préféré qu’il se tienne à Nice. Il durera plusieurs semaines, du 5 septembre au 15 novembre 2022.
Et le mémorial ?
La municipalité travaille à la création d’une Maison du souvenir et d’un centre d’études pour “lutter contre le risque de l’oubli”.
Le mémorial installé dans les jardins de la Villa Masséna va y rester de façon pérenne. Les associations ont choisi la Promenade des Anglais pour l’installation du futur monument, sans doute au niveau du Palais de la Méditerranée, à l’endroit où le camion a pu être stoppé par les policiers.
Christian Estrosi souhaite également qu’une oeuvre soit installée sur la Colline du Château pour rendre hommage “à toutes les victimes du terrorisme”.
Nice a connu trois attaques depuis 2015.