OBJECTIF MÉDITERRANÉE -- Nice continue d'oeuvrer pour ses relations méditerranéennes. Alors que le rapport Stora a été remis récemment au chef de l'État et que notre ville accueillera le soixantenaire du rapatriement d’Algérie en 2022, Christian Estrosi et Agnès Rampal ont publié une tribune engagée dans les colonnes de L'Opinion.
Les élus estiment ainsi qu'il est primordial de poursuivre le travail de réconciliation par le respect des différentes mémoires, engagé depuis des années. Le texte rend hommage à la loi du 23 février 2005, qui "reconnaît les souffrances éprouvées par les rapatriés, les anciens membres des formations supplétives et assimilées, les disparus et les victimes civiles et militaires des événements liés au processus d’indépendance".
Début 2006, "à titre d'apaisement", l'alinéa mentionnant le "rôle positif de la présence française outre-mer" avait été supprimé sur demande du président Jacques Chirac, tout en maintenant celui consacrant "la place que mérite la recherche universitaire française, notamment en Afrique du Nord".
"Le respect de toutes les mémoires spécifiques, sans en imposer aucune au détriment des autres, constitue la voie à suivre" Agnès Rampal et Christian Estrosi dans "L'Opinion"
Christian Estrosi a toujours été très engagé sur cette question. "Je ne suis pas un nostalgique de l'Algérie française. Le général de Gaulle a bien fait de suivre la voie qu'il a suivi après 1962" avait-il expliqué en 2012, sans avoir un "devoir de repentance sur l'oeuvre civilisatrice de la France", alors que certains médias lui avaient reproché un discours positif à l'égard de cette époque.
Reconnaître "l’indigne abandon des harkis"
Dans le cadre de cette considération "de toutes les souffrances", le maire de Nice et Agnès Rampal demandent, toujours dans L'Opinion, que "soient officiellement reconnus les drames que furent la fusillade de la rue d’Isly du 26 mars 1962, le massacre d’Oran du 5 juillet de la même année, ainsi que l’indigne abandon des harkis et ses douloureuses conséquences".
Nice, "ville d’accueil irréprochable pour nos compatriotes exilés", commémorera durant toute l’année 2022 le soixantenaire du rapatriement. "Ce temps aura pour ambition de contribuer à la rigoureuse exhaustivité de la vérité. Le travail des historiens doit distinguer les faits et les mémoires, ne jamais tourner le dos à l’objectivité" souligne encore l'édile. "Il est ainsi impératif que toutes les souffrances soient reconnues, sans en occulter une seule. A ce titre, les disparus français en Algérie ne peuvent être oubliés. Le respect de toutes les mémoires spécifiques, sans en imposer aucune au détriment des autres, constitue la voie à suivre."
"Co-construire 'la Méditerranée du futur"
Les élus niçois ouvrent également la porte à de "nouvelles relations avec la République d’Algérie. Une nouvelle fraternité est à construire entre nos deux pays, aussi forte mais différente de celle qui a uni les femmes et les hommes qui ont partagé cent trente-deux ans d’histoire commune".
L'objectif ? "Constituer une base solide pour co-construire 'la Méditerranée du futur', celle que nous voulons laisser à nos enfants, bassin de paix, de prospérité et de culture".
À ce titre, "face au réchauffement climatique, aux questions liées à la jeunesse, l'éducation et l'emploi", nos deux pays se doivent de mener une "action collective, résolue et respectueuse. (…) Face aux difficultés qui y sont plus exacerbées qu’ailleurs, nous appelons au renouveau humaniste de la civilisation."
Avant de conclure : "pour construire un avenir commun en Méditerranée, nous sommes convaincus que la prise en compte de toutes les mémoires, en Algérie et en France, permettra leur dépassement pour libérer et faire fructifier les projets d’aujourd’hui, donnant ainsi naissance aux réalisations de demain. Nous souhaitons apporter notre pleine contribution à ce noble objectif."
Nice renforce son engagement méditerranéen
L'initiative courageuse d'Agnès Rampal et Christian Estrosi dépasse le cadre d'une banale déclaration d'intention. Encore aujourd'hui, la mémoire franco-algérienne reste un sujet sensible sur lequel il est risqué de s'aventurer. Il y a encore quelques mois, alors en visite en Algérie, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin déclenchait une polémique en déposant une gerbe tricolore aux "martyrs" du Front de libération nationale (FLN). Un geste qu'avait également accompli le président de la République Emmanuel Macron en 2017. "Entre la France et l’Algérie, les plaies toujours ouvertes de la mémoire" titrait à cette occasion Le Monde.