Voici deux ans que la construction d'un nouveau parc des congrès à l'Ouest enflamme la presse et l'opposition. Il s'agit pourtant d'une promesse datant de 2008, née d'une alerte lancée… sous Jacques Chirac.
C'était il y a plus de quinze ans, en 2006. Un épais rapport commandé par le gouvernement atterrit sur le bureau du ministre de l'Aménagement du territoire. Un certain Christian Estrosi.
Circonstancié, il fait apparaître un gros point noir sur les Alpes-Maritimes : "le palais Acropolis à Nice, et celui des Festivals, à Cannes, ne répondent plus aux attentes des organisateurs de grands congrès". Un vrai souci pour le Sud-Est, qui vit, en bonne partie, grâce à l'évènementiel.
Faut-il, dès lors, tout bêtement se hâter d'en bâtir un nouveau, histoire de régler le problème ? Pas si vite. Ce n'est alors pas le seul retard qu'accuse notre département.
En 2008, le même Christian Estrosi, candidat à la mairie, promet noir sur blanc dans son programme électoral, de bâtir "un nouveau palais des congrès et des expositions dans la plaine du Var".
L'ancien directeur du tourisme cannois Henri Céran modère alors les ambitions des uns et des autres : inutile de construire des bâtiments pharaoniques tant que ne sont pas réglés "les problèmes de transports" - qui sont d'un niveau "catastrophique" - et que de "nouveaux hôtels ne sont pas ouverts".
Sur ce dernier point, c'est "Nice-Matin" dans son édition du 2 juillet 2008 qui note carrément que "si deux manifestations d'envergure devaient se dérouler à Cannes et à Nice aux mêmes dates, il faudrait faire dormir les congressistes à quatre par chambre !"
Qu'est-ce qui a changé depuis ? Que ces deux points ont été réglés.
Pour le premier, celui des transports, l'exemple le plus parlant reste la livraison des lignes 2 et 3 du tramway, qui rendent accessible l'Ouest en quelques minutes, depuis le centre-ville ou l'aéroport.
Pour le second, Nice compte aujourd’hui 9.500 chambres d'hôtel. 3.000 sont, en ce moment-même, en chantier, « aucun n’ayant été suspendu » malgré le Covid. Bientôt, « nous serons la ville qui proposera l’offre la plus diversifiée de la Côte d’Azur dans le domaine. Rivalisant avec Cannes et Monaco » estime la mairie.
Le projet de faire sortir un nouveau PEC de terre à l'Ouest (il prendra place dans la structure de l'actuel MIN Fleurs) n'a donc rien de bien nouveau, malgré ce que l'opposition assure depuis deux ans. Et il s'agit donc d'une claire nécessité depuis une quinzaine d'années.
Quelques doutes
Le professeur Laurent Castillo, directeur du service ORL du CHU, a contacté "Nice-Presse" pour faire part de ses inquiétudes.
L'homme est un proche d'Éric Ciotti, meilleur-ennemi du maire de Nice. Mais c'est en sa qualité d'organisateur de congrès qu'il souhaitait s'exprimer.
"Entre la fermeture pour démolition d'Acropolis et l'ouverture du nouveau palais des congrès en 2026, la Ville nous propose quelque chose au palais Nikaïa. Mais 'ces solutions' sont tellement dégradées que ce n’est pas acceptable pour nous" souffle-t-il. Lesquelles n'ont pas encore été présentées en détail.
Autre grief, cette fois concernant le quartier : "d’un côté on a l’autoroute et, de l’autre, on a les Moulins. On ne peut pas faire venir un tourisme médical, qui est haut-de-gamme, là-bas. C’est impossible."
Alors que Laurent Castillo développe ces questionnements fin-novembre - il a eu l'occasion de le faire à un meeting d'Éric Ciotti mi-décembre - il estime que les congressistes "seront obligés de partir ailleurs".
"Je le regretterais parce que je suis Niçois et que l’on a créé les Assises (son évènement, ndlr) dans cette ville, mais on n’aura surement pas le choix. Et ce n’est pas dit que nous reviendrons en 2026, lorsque le nouveau palais niçois sera construit. Par exemple, de Cannes est parti le Mobile World Congress, qui s’est installé durablement à Barcelone."
En l'espèce, si le MWC a quitté Cannes il y a dix ans, c'est exactement à cause des lacunes listées dans le rapport gouvernemental de 2006 : la cité azuréenne n'était pas assez équipée pour accueillir correctement un évènement international qui est passé de 30.000 à 90.000 visiteurs, comme le rappellent nos confrères de ZDnet. L'exemple joue donc en faveur du projet estrosiste.
Clément Avarguès avec Noémie Meffre