Christian Estrosi prouve encore une fois, s'il le fallait, que naviguer à contre-courant ne le gêne pas le moins du monde. Et tant pis si son soutien affiché au nouveau confinement local lui met à dos une partie des autres maires des Alpes-Maritimes. Samedi dernier, il défendait déjà l'idée d'un confinement local, si la décision devait être prise face à la flambée épidémique que connaît notre territoire.
Lundi 22 février, alors que cette nouvelle restriction était annoncée par le préfet, le président de la métropole "saluait" cette décision, qui va "dans le sens de ce que je souhaitais et de ce que nous avons évoqué avec Olivier Véran à mon bureau lors de son déplacement". Une opinion pour le moins isolée, alors que la plupart des maires de l'ouest maralpin sont, eux, vent debout.
Far-west maralpin
Celui qui manie le lance-flammes avec le plus d'énergie semble être le maire de Villeneuve-Loubet, l'éruptif Lionnel Luca. "Les déclarations des élus niçois qui s’érigent en donneurs de leçons sur l’intérêt de confiner tout le littoral sans se préoccuper de ce que pensent les (autres) élus en dehors de Nice est particulièrement pénible à supporter et singulièrement irrespectueux ! Impérialisme!" s'emporte-t-il sur les réseaux sociaux.
Alerte coronavirus dans les Alpes-Maritimes : le point complet des restrictions et de la situation sanitaire
Dans un langage plus châtié, David Lisnard à Cannes, Jean Leonetti à Antibes et Jérôme Viaud à Grasse ont soutenu à de nombreuses reprises que le gros du rebond épidémique se concentre sur Nice et sa métropole, et non dans leurs communes, tandis qu'une vaccination massive serait plus à même d'arranger la situation qu'un quelconque re-re-confinement.
Alors que notre département est particulièrement concerné depuis décembre, au 21 janvier, seuls 4.1% des habitants y ont été vaccinés, d'après les données du ministère de le Santé rapportées par CovidTracker.
Défense
En "Estrosie", on bat en brèche les critiques. "L’accélération de la vaccination est sans surprise une volonté partagée par tous. Mais il faut deux doses et vingt-huit jours entre les deux pour que cela soit efficace. La situation de saturation des réanimations dans le département pose des questions plus urgentes" rappelle à toutes fins utiles le bras droit du maire, le premier adjoint Anthony Borré.
Et "il est logique que le couvre-feu concerne tout le littoral. Comment ne pas admettre que le virus ne s’arrête pas aux portes de Nice et de son comté?"

C'est sur le terrain médical que le docteur (et élu) Hervé Caël répond également aux attaques entendues contre la position du "chef": "la situation imposait ces mesures pour permettre aux soignants de prendre en charge tous les patients Covid-19 et limiter les déprogrammations de soins non-Covid dans les jours et les semaines" avance-t-il.
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Tout en soulignant finement "le point des lits disponibles (ce week-end, NDLR) dans les services de réa hors-Covid-19, soumis à une extrême tension : zéro à Cannes et Grasse, un seul de libre à Antibes…"
L'adjoint niçois Gaël Nofri monte également au front sur Twitter, s'adressant aux autres maires : "Je peux comprendre votre logique à condition de la pousser au bout. Les communes qui ne veulent pas participer à l’effort collectif acceptent-elles de voir leurs habitants interdits de travailler à Nice, d’accéder à la ville et à ses infrastructures (aéroport, université, CHU)?"
Singulier, à La Trinité, le maire de gauche Ladislas Polski souligne dans Nice-Matin l'existence d'une "unité de vie dans une zone hyper urbanisée, une communauté de problématiques… Je le sais, c’est plus facile de dire à nos concitoyens qu’on est contre ces mesures. Mais en cette période, le rôle des élus n’est pas forcément de dire aux gens ce qu’ils ont envie d’entendre".
L'opposition niçoise remontée
Une fois n'est pas coutume, l'ancien élu socialiste à Nice Patrick Allemand et le conseiller municipal Rassemblement national Philippe Vardon portent un regard similaire sur la situation sanitaire de la capitale azuréenne. L'un a développé ses arguments dans une communication transmise à Nice-Presse lundi, l'autre en a fait autant sur BFMTV dimanche soir.
Les deux rappellent l'organisation très critiquée, l'été dernier, du concert de The Avener dans la capitale azurénne (à noter qu'aucune consigne préfectorale n'encadrait alors ce genre de manifestation, les consignes ont ensuite été durcies à la demande de la Ville). Les deux pointent également "trop de messages ou d'injonctions contradictoires", "l'inefficacité et le non-sens de ce couvre-feu avancé à dix-huit heures…"
🎥 Le couvre-feu à 18h imposé à #Nice06 par @cestrosi est un échec absolu !
Et maintenant il demande à ses amis du gouvernement un nouveau confinement, alors que les infectiologues du département sont CONTRE.J’étais ce soir en direct sur @BFMTV.⤵️ pic.twitter.com/NZAz21BNVp
— Philippe Vardon (@P_Vardon) February 21, 2021
Au-delà même des disparités départementales, Patrick Allemand pointe une "ségrégation territoriale" qui aurait cours au sein même de Nice. Là encore, la faute, notamment, de la mairie : "dans les quartiers, il n'y a quasiment aucun contrôle. Aussi, ce n'est pas un hasard si les endroits où les taux d'incidence explosent sont les quartiers de l'Ariane, des Moulins et de Bon Voyage. Ce ne sont pourtant pas les lieux les plus fréquentés par les touristes!"
Tout en ironisant : "La pandémie de la Covid, c'est comme le nuage nucléaire de Tchernobyl, elle ne s'arrête pas aux portes de la ville, au pont Garigliano".
Ce variant anglais qui rebat les cartes
Un facteur pourrait être oublié, à force de mener les examens de conscience des uns et des autres sur plusieurs mois : pour certains médecins, l'apparition des différentes variantes du virus nous confronterait à une nouvelle épidémie, plus qu'à un rebond.
En tous les cas, dans les Alpes-Maritimes, "c'est le variant anglais, plus contagieux et probablement plus dangereux" qui aurait "fait basculer la situation" ces derniers jours, d'après le médecin Olivier Guérin, chef du pôle gériatrie au CHU de Nice et membre du Conseil scientifique, lundi lors du point presse préfectoral.
Avant d'ajouter, avec un optimisme qui (là, c'est incontestable) nous manque : "la promesse de jours meilleurs se compte toutefois en semaines". Ouf !