C'est une vaste hypocrisie, depuis des années. Alors que les pouvoirs publics montrent les muscles dans la lutte contre les stupéfiants, un tiers des Français disent avoir déjà fumé un joint, d'après plusieurs études.
Mieux encore, notre pays serait l'un des plus grands consommateurs d'Europe.
Un phénomène qui est, on le sait, particulièrement développé dans le Sud et les Alpes-Maritimes. On a vérifié à quel point en suivant un acheteur dans quatre lieux emblématiques entre 17 et 21 heures, en plein centre de Nice. Loin des "quartiers chauds", et sous l'oeil des caméras…
Port Lympia

Pas besoin de chercher bien loin. Au port, on trouve de beaux bateaux, plein de touristes et d'aimables dealers. Près du grand parking, de l’autre côté de la digue, c'est par un "tu veux combien?" que l'on est accueillis.
En seulement dix minutes, l'affaire est dans le sac. Devant quelques étrangers, la transaction a lieu en deux temps trois mouvements. Le client repart avec son cannabis dans la poche.
La Promenade des Anglais

Entre le quai des États-Unis et les Ponchettes, bienvenue dans la carte postale. Mais aussi dans le lieu parfait pour trouver ce que l'on cherche. Après quelques pas, un groupe nous aborde. Cinq petites minutes et on nous en propose déjà.
On nous décrit un large panel de choix de stupéfiants, pendant que les militaires de Sentinelle passent tout près. Face aux terrasses bondées des bars, là encore, la transaction est menée sans encombre.
Place Masséna

Pas de chance, les préparatifs de Carnaval occupent presque toute la place. Dans la Coulée verte, pareil, pas un chat. Trop compliqué de vendre par ici ces jours-ci, sûrement. Après avoir tourné pendant 45 minutes, nous restons bredouilles.
Le grand raout, sur-protégé, fait fuir dealers comme clients. La Ville a peut-être trouvé là une superbe solution : Carnaval comme meilleur bouclier face aux trafics, si on nous avait dit…
Cimiez
Sur ce coup là, nous avons été ambitieux. Dans le très chic quartier Cimiez, est-il possible d’en obtenir ? Les arènes, le musée Matisse, le grand parc… Après une bonne heure de recherches, impossible de trouver qui que ce soit.
Sarah B. vit ici. "Ça fait dix ans que j'ai bien compris qu'il y a des consommateurs, mais pas de vendeurs dans nos rues" rapporte la riveraine. Ça fume donc, mais il faut aller s'approvisionner ailleurs.
La mairie en pointe
Particulièrement concernée, comme d'autres grandes villes du Sud, par le trafic de drogues, Nice a toutefois pris le dossier à bras-le-corps depuis des années. La police municipale, première de France, déloge, autant que possible, les dealers , avec les quelques prérogatives qu'elle peut avoir en la matière. Christian Estrosi a réussi à nouer un partenariat avec la justice et les forces de l'État pour accentuer la lutte. Le maire en est convaincu, nous sommes sur la bonne voie. Mais une problématique pareille ne se règle pas en un jour. Surtout quand les mauvaises habitudes sont si largement ancrées…