Interview - Début mai, le premier adjoint niçois chargé du logement et président du principal office HLM du département annonçait un plan pour "combattre la spéculation immobilière".
RELIRE : Crise du logement : à Nice, une charte pour "combattre la spéculation immobilière"
La Ville de Paris pourrait interdire l'installation de meublés touristiques de type Airbnb dans les quartiers qui en auraient déjà trop. Faisable à Nice, notamment dans le centre-ancien ?
Anthony Borré : C'est une option. Cette restriction, je ne veux pas l'exclure. Dans le Vieux-Nice et l'hyper-centre, c'est possible.
Nous avons, à Nice, durci la réglementation en la matière. Elle est plus sévère qu'ailleurs. Ici, les co-propriétés doivent décider si oui ou non un appartement résidentiel peut devenir un Airbnb. La plupart du temps, c'est non. Par exemple, l'an passé, on compte 750 refus de ce que l'on appelle les "changements d'usage". 56% des demandes sont recalées.
Parmi d'autres dispositifs, dans nos services, cinq agents mènent des contrôles pour vérifier que les annonces sont en règle, correctement déclarées. Mais je veux rappeler que le droit de propriété se respecte, il ne faut donc pas trop contraindre les propriétaires.
1 commerce sur 8 a été transformé en meublé touristique dans le centre de Paris, entre 2020 et 2022, à cause du manque de régulation. C'est un risque que l'on court à Nice ?
Chez nous, il y a d'autres règles d'urbanisme. A Paris il suffit d'une déclaration. A Nice, les propriétaires doivent déposer des demandes, qui font l'objet d'une instruction par nos services, avec des refus très conséquents. La dérive parisienne n'existe pas ici.
14% des appartements de chez nous sont inoccupés. Que faire ?
Taxer. Le niveau actuel de prélèvement est trop bas, et les recettes reviennent à l'Etat. Il faut faire payer plus cher, et reverser ces montants aux collectivités, pour renforcer leur politique du logement. Par ailleurs, nous convoquons les propriétaires quand des bâtiments sont longtemps fermés.
Vous dites "le marché s'auto-régule". Pas assez à Nice, c'est le moins que l'on puisse dire : c'est la ville de France où il est le plus compliqué de louer ! La Fondation Abbé-Pierre réclame un encadrement des loyers. Et plusieurs chiffres indiquent que cela produit des effets à Paris…
J'y suis opposé. Ici, on veut réguler, mais pas être dirigistes. Cela serait contre-productif : les propriétaires retireraient leurs biens du marché. Vous me dites qu'il y a une tension locative à Nice, ce n'est pas tout à fait une mauvaise nouvelle. Elle démontre l'attractivité d'une ville embellie, enviée, avec des rénovations, des lignes de tramway…
De là à gentrifier Nice et d'en écarter les moins riches, comme le craint l'opposition ?
Ce n'est pas ce que nous faisons. On ne peut pas accueillir partout de nouveaux habitants et bétonner à outrance. On refuse de nombreux projets sur les collines niçoises, qui sont déjà saturées. Tout en menant une politique très volontariste en termes de logements intermédiaires et sociaux.
Sur les HLM, où en êtes-vous ? L'objectif fixé par le programme local de l'habitat n'est suivi qu'à 42% en 2022 : comment expliquer ce mauvais chiffre ? (voir encadré)
Le chiffre du plan local d'urbanisme (PLH) se regarde avec un décalage de deux ans. En 2022, nous évoquons donc les constructions de 2020, une année chamboulée par la crise Covid.
Vous deviez mener une étude sur la possibilité de surélever des immeubles pour y aménager des logements. C'est vraiment du concret ?
Côte d'Azur Habitat doit livrer au minimum 150 logements sociaux par an. D'après les résultats de l'étude que je vous livre, nous apprenons que nous serions en capacité, en surélévation, d'avoir 2.000 nouveaux appartements. Et encore, je ne vous parle que du patrimoine de l'office HLM. Ce n'est pas nécessairement ce que nous allons bâtir. Mais ce chiffre illustre les potentialités qui s'ouvrent à nous. Le privé doit, lui aussi, s'en saisir.
Logements sociaux à Nice : les chiffres complets
En 2022, la Métropole compte 37.290 logements sociaux (12,89%) et la ville 27.052 (14,2%), pour 25% exigés par la loi. Soit, respectivement, 2.135 et 1.138 de plus en deux ans.
L'an passé, la Métropole a rempli 72% des obligations du Programme Local de L'habitat (PLH) avec un total de 1.238 nouveaux logements. C'est 42% et 429 pour la ville.
Nombre et taux de LLS (Logement Locatif Social) sur la Métropole et sur Nice

Objectifs du PLH
