Selon la fondation Abbé Pierre, les Alpes-Maritimes est le département dans lequel il est le plus difficile de se loger, avec un taux de pauvreté supérieur à la moyenne nationale. Pourtant, il semblerait que la construction et la réhabilitation de logements sociaux ne fassent pas toujours partie des priorités de nos élus.
En effet, selon les données les plus récentes que nous ayons à notre disposition, en 2016, la part des logements sociaux à Nice s'élevait (seulement) à 12,7%. Un nombre bien inférieur à la cible fixée par la Loi Solidarité et Renouvellement (SRU, *) pour 2025 : 25%.
Ce taux, 12,7%, n'a progressé que de 2,2% sous les deux premiers mandats de Christian Estrosi et est d'autant plus faible que le taux au niveau national s'élève à 17%.
Dans le même temps, Nice a perdu des habitants. Plus de 8.700 en moins en dix ans, entre 2007 et 2017, sur la trajectoire d'une baisse continue d'environ - 0,1 % chaque année en moyenne (4.600 entre 2013 et 2018, d'après l'Insee).
Mais comment peut s'expliquer ce retard ?
Sur la Côte d'Azur en général, la demande est pourtant très importante : 37.000 foyers sont actuellement en attente d’un logement social, 70% des familles azuréennes y sont éligibles.
Christian Estrosi s'engageait, en mars 2020, à "poursuivre la réhabilitation des logements dans le parc public, mais aussi dans le parc privé en soutenant l'augmentation de logements avec l'Agence nationale de l'habitat". En 2018, 2.219 logements sociaux ont été construits, contre 1.988 en 2014 et 1.570 en 2009, ce qui atteste d'un effort.
La ville reste soumise à un prix très élevé de l'immobilier et à un territoire déjà fortement urbanisé qui rend la situation très complexe pour les décideurs.
Dix mois après sa réélection, le maire de Nice reste vague sur la question. Dans son interview du 12 janvier, ce dernier nous déclarait : "nous y travaillons, et nous allons maintenir la même courbe en 2021."
Néanmoins, pour que les objectifs puissent être remplis, il faudrait non pas maintenir, mais accélérer le cap.
En outre, il semblerait que la priorité soit ailleurs. Christian Estrosi souhaite une "vraie mixité dans l'offre de logements", en axant notamment sa politique sur le développement des industries de pointe, du secteur de la santé et des grandes écoles, "qui apportent des emplois qualifiés et l’arrivée d’entreprises de la nouvelle économie".
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Il s'agirait donc de construire des logements sociaux, qui seront des "logements pour actifs", précise le maire, mais pas trop, afin de continuer à développer les secteurs les plus attractifs pour des classes relativement plus aisées.
On freine encore plus des quatre fers du côté du RN, qui dénonce "la dictature de la loi SRU" : "on voit partout que la bétonnisation progresse et avec elle, la paupérisation. Les habitants de Nice Nord veulent-ils en plus de cela subir l’immigration que ces logements sociaux ne vont pas manquer d’apporter ? Je ne le crois pas une seconde." déclarait chez nous le conseiller municipal Philipe Vardon le 8 janvier dernier.
Par ailleurs, il n'hésite pas à plaider "pour que soit mise en place la priorité nationale, pour que les Niçois et les français soient prioritaires dans l'attribution des logements sociaux".
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La ville a toutefois été remarquée pour son volontarisme et son dynamisme dans le domaine, ce qui lui a évité d'éventuelles sanctions financières, pour l'instant.
(*) : Depuis 2000, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains impose aux communes de plus de 3.500 habitants de disposer d'ici à 2025 de 20% de logements sociaux, un taux relevé à 25% en 2014, excepté pour celles qui justifient d'une situation locale particulière.