PAROLE À L'OPPOSITION - Sécurité, commerces, santé… Juste avant la pause des Fêtes, le patron du groupe Rassemblement national au conseil municipal de Nice dresse un premier bilan du mandat en cours. Avec les questions des lecteurs de Nice-Presse.

Le TNN et Acropolis
La ministre de la Culture valide la destruction du TNN. Vous vouliez le sauver, ça semble perdu, non ?
Je ne le pense pas. La mairie communique sur ça triomphalement, comme si madame Bachelot était descendue à Nice pour attaquer le théâtre à coup de marteau-piqueur. En réalité, on lit dans son courrier le manque d'enthousiasme du ministère. Il note par exemple la "contrainte" qui réside dans l'éclatement des nouvelles salles à divers endroits. Elle pose comme condition qu'elles soient toutes prêtes en 2022 : pour celle d'Iconic, ce n'est pas crédible.
Que proposez-vous ?
Nous avons écrit à Roselyne Bachelot pour l'alerter : il faut surseoir à la démolition du Théâtre national.
La Coulée verte peut être prolongée sans abattre le TNN, qui a une vraie cohérence architecturale avec le MAMAC. Et il y a la question de la facture : je lis dans Nice-Presse que la mairie refuse de rénover le théâtre national pour 17 ou 20 millions. Or, les coûts de son projet, qui ont tous doublé voire triplé, sont bien supérieurs à cette fourchette.
Tout ça n'est pas au niveau du TNN, d'autant que dans l'intervalle, il y aura une solution de bricolage, avec des salles provisoires partout (Lino Ventura, l'Opéra…), qui va coûter 530.000 euros aux contribuables.
D'autres initiatives ont été lancées, par les socialistes ou les écolos. Allez-vous travailler ensemble ?
C'est possible, ensemble c'est mieux. Patrick Allemand (ex-élu PS niçois, ndlr), par exemple, a toujours été très cohérent sur le sujet. Même Éric Ciotti a changé d'avis. Et rappelez-vous du sauvetage du centre Costanzo (il y a dix ans, ndlr). Nous avions mené la bataille avec les communistes.
Vous militez aussi pour la sauvegarde du Palais des Congrès Acropolis, mais il demande des rénovations gigantesques…
En 2019, Acropolis a fait sa meilleure année commerciale. Et quand il tient son premier grand meeting de campagne (pendant les municipales 2020, ndlr), Christian Estrosi l'organise là-bas !
Le problème, c'est qu'il veut construire sa nouvelle ville, avec soi-disant de l'activité : il nous annonce à chaque fois 50.000 nouveaux emplois, il n'est pas capable d'en démontrer 500. C'est ça, la réalité. Le développement à l'Ouest est un échec : c'est un quartier d'affaires sans affaires, des immeubles de bureaux sans bureaux. L'Éco-Vallée, c'est la Béton-Vallée.
Il n'y a aucune logique à emmener les congressistes à l'Ouest, avec un palais des congrès semblable à ce qu'on trouve partout ailleurs en Europe, avec des restaurants de chaîne, alors qu'ils pourraient venir dans le centre-ville, découvrir Garibaldi, le Vieux-Nice…
Ils sont proches de tout, avec le tramway.
Et alors, où est la logique ? Envoyer le Palais des Congrès à l'ouest pour espérer que les congressistes prennent le tram pour venir dans le centre depuis là-bas ?

Sécurité
Juste avant cet interview, on apprend qu'un homme a reçu une trentaine de coups de couteau à 5 minutes en voiture de la mairie. Quelle est votre réaction ?
L'ensauvagement du pays se retrouve également dans notre ville. Certains journalistes m'ont reproché de le dire pendant les municipales. Ils ont donc dicté leur agenda, avec des débats sur les pistes cyclables. Bon, nous en sommes là. Dans la foulée de l'élection, on a eu un été de fusillades et d'attaques au couteau. La préoccupation majeure des Niçois, et les sondages le disent : c'est la sécurité. Ça souligne d'ailleurs cet échec majeur de Christian Estrosi.
Le maire a recruté dans sa police municipale, obtenu des renforts nationaux, déployé de nouveaux équipements (caméras, etc). Que faire de plus ?
C'est l'Inspecteur Gadget ! Il croit tout résoudre avec des drones, des caméras et des boutons. C'est utile, mais il faut du bleu sur le terrain. On a fermé des postes de police municipale dans les quartiers. Il faut les rouvrir, et notamment en installer un avenue Jean-Médecin. 40% de l'insécurité est concentrée sur l'hypercentre à Nice. Il faut aussi recruter 100 agents supplémentaires.
On nous parle de "première police municipale de France", mais par exemple à Cannes, rapporté au nombre d'habitants, il y a beaucoup plus de policiers. Il en faudrait 1.000 à Nice pour être à ce niveau là.
Cannes n'est pas non plus un paradis sécuritaire…
Non, effectivement. La politique nationale compte aussi. Christian Estrosi paie de soutenir Darmanin au ministère de l'Intérieur ou Dupond-Moretti à la Justice. Dans sa longue dérive, il est maintenant de centre-gauche !
Covid-19
La cinquième vague est là, quelques jours avant les fêtes, alors que de nombreuses animations sont proposées à Nice et partout dans le département. Faut-il serrer la vis ?
On a un maire qui s'est conduit en "monsieur plus". C'est un extrémiste du sanitaire. Il crée la division avec ses propos contre les non-vaccinés. Le "pass sanitaire" ne fonctionne pas, et n'a servi qu'à pousser les gens à la vaccination. La solution, c'est de créer des postes à l'hôpital. Il se promène bras dessus, bras dessous avec le ministre de la Santé sur la Prom'. Il n'a qu'à lui en demander pour notre CHU.

Vie locale
Que pensez-vous de l'état de la circulation à Nice, qu'y changeriez-vous ?
Même en piéton, le centre-ville c'est devenu compliqué ! C'est le chaos, sans doute volontaire, puisqu'il résulte de décisions politiques. La mairie de Nice fait la chasse aux voitures, on est dans une "autophobie" évidente. Les caméras qui sont sensées protéger les Niçois servent compulsivement à les verbaliser.
Un tiers d'entre eux habitent sur les collines, rien ne leur est proposé au niveau des transports. Il faudrait aussi accorder un euro de stationnement gratuit pour un euro dépensé dans le centre-ville. Il faut arrêter de mettre des pistes cyclables partout. Personne n'emprunte celle du Port, par exemple.
Il va falloir comprendre que par nécessité, et pas par plaisir, des habitants de cette ville auront toujours besoin de leur voiture. La mère de famille ne va pas mettre ses enfants sur le porte-bagages de son vélo. L'artisan et sa caisse à outils ne va pas prendre le tram. L'habitant des collines ne va pas descendre place Masséna avec son deltaplane.
Vous dites que le centre ville "se meurt", pourquoi et que faire ?
La bataille du centre-ville est la bataille majeure de notre avenir. La sécurité et la circulation sont les questions clés. Nice est en train de s'effondrer par son centre, comme Marseille. Vous avez l'insécurité, les problèmes de circulation… Et à côté, en périphérie, on laisse se construire d'immenses centres commerciaux.
Comme dit Roland Barthes, cité par Luchini à propos de Paris : "j'aime une ville quand elle est habitable, je ne l'aime pas quand elle est visitable". Jean-Médecin est une avenue dégradée. Et passé trois rues, c'est l'apocalypse.
Pourquoi votez-vous toujours contre la construction de nouveaux logements sociaux ?
Nous refusons le bétonnage de notre ville. Et ils vont à qui, ces logements sociaux ? Il faut imposer la priorité nationale. Les Niçois doivent comprendre que les HLM qui sont construits, la mairie ne leur donnera pas. L'immigration se déverse sur notre ville.

Un projet a été présenté au Port, qu'en pensez-vous ?
Nous verrons. Il y a ce qui est présenté, et ce qui est fait. La place Île-de-Beauté, par exemple, devait être magnifique, aujourd'hui vous avez des arbres morts et des pots qui s'effondrent… Rien n'a été fait, le quartier s'est beaucoup dégradé. Olivier Bettati (le coordinateur de la mission de réflexion, ndlr) pourrait aussi s'occuper des campements de migrants. Le Port est l'un des endroits où le RN progresse le plus électoralement. Ce n'est pas un hasard !
Et garde à ne pas en faire la chasse gardée des riches. Je préfère y voir des pointus que des yachts de milliardaires.
Quel regard portez-vous sur le quartier des Moulins, où vous avez grandi ?
On a mis 329 millions d'euros là-bas et rien ne s'arrange. Christian Estrosi a dit chez vous que tout était formidable, il n'y a pas longtemps il s'y faisait caillasser avec le préfet. Il y a toujours plus de deal, et les islamistes ont pris la main.
Politique
À quand une liste commune avec Éric Ciotti ?
On pourrait lui poser la question, il a eu plusieurs occasions de s'affirmer. Avant les municipales, il faisait les mêmes constats que nous sur la gestion Estrosi. Puis il l'a re-soutenu. Aux régionales, il dénonce le macronisme de Muselier… avant de le soutenir juste avant le second tour. Il a un problème de cohérence.
Il a fait des erreurs. Mais je ne jette d'interdit sur personne, c'est aussi ça la politique. Et s'il sautait le pas ?
Qu'avez-vous prévu pour les élections législatives ?
La circonscription la plus naturelle serait pour moi la 3ème, avec une affection toute particulière. La 1ère est intéressante, c'est la bataille du centre-ville. Et la cinquième, j'y ai grandi. Je suis un Niçois, je serai candidat dans l'une des trois.
Interview réalisée le 10/12/21