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Nouveaux policiers municipaux, trafic de drogue, bilan de l'été… Anthony Borré, premier adjoint au maire et vice-président de la Métropole, fait sa rentrée média dans Nice-Presse.
- Lire la première partie : Nice : Airbnb, HLM, quartiers à rénover… L'interview de rentrée du premier adjoint Anthony Borré
Nice-Presse : les chiffres locaux de la délinquance sont sortis. Citez-nous un point qui vous satisfait, un autre qui vous inquiète ?
Anthony Borré : Nice est l'une des grandes villes les plus sûres de France, alors même qu'elle accueille des millions de visiteurs. Nous aurions peut-être les mauvais chiffres d'autres communes si Christian Estrosi n'avait pas fait le choix de recruter massivement dans la police municipale, ou d'installer partout en ville bornes SOS et caméras.
Il faudrait être aveugles pour ne pas voir que dans notre pays, les délinquants sont de plus en plus jeunes. Le narcotrafic a pris une place considérable dans de grandes villes telles que la nôtre, mais aussi dans les campagnes. Le sentiment d'impunité chez les criminels est extrêmement fort. Les refus d'obtempérer en témoignent.
Je regarde donc nos chiffres avec humilité : il ne faut rien lâcher. Nous porterons au budget communal 2025 le recrutement d'une cinquantaine de nouveaux policiers municipaux.
Le Conseil départemental des Alpes-Maritimes a lancé il y a un an l'idée d'ouvrir un centre qui pourrait gérer en même temps l'ensemble des images de vidéoprotection des communes rurales. La Métropole a proposé la même chose en juillet. Pourquoi ce doublon ?
Chacun ses compétences. La prévention de la délinquance figure parmi celles des Métropoles. Fin 2025, nous aurons un Hôtel des Polices mutualisé avec un centre d'hypervision en capacité de recevoir toutes ces images. Ce n'est pas le cas du Département.
À Nice, bien des femmes disent leur insécurité dans l'espace public le soir venu. Certains faits divers récents leur donnent évidemment raison. Vous l'entendez ?
Le sujet de l'ensauvagement de la société n'est pas niçois, il est national. Je souhaite que nous deployons des moyens supplémentaires de protection, même s'il y en a déjà beaucoup en ville. Bientôt, nous proposerons une application aux femmes, aux seniors qui permettra d'avoir un accompagnement pour être protégés sur la voie publique.
Que retient-on du bilan de la police municipale cet été ?
Les interpellations, 1710, sont en hausse de 9%. On constate beaucoup de délits routiers et d'infractions liées aux drogues. 1087 verbalisations, dont 20% pour des nuisances sonores. Beaucoup d'établissements ont été contrôlés, à la fois pour ce qui est des horaires de fermeture que pour des sujets d'hygiène. Les arrêtés pris par le maire cet hiver ont permis de bien lutter contre les regroupements, les bivouacs et l'ivresse publique manifeste.
Du 1er janvier au 11 septembre. La police municipale a procédé à 4700 interpellations, dont 900 ayant trait aux drogues (+20%) et 1335 pour des délits routiers.
Comment expliquer cette hausse des interpellations ?
Nous avons enregistré des flux très importants avec cette saison, et nous étions organisés différemment. Mais je note que, et c'est au plan criminel, mis à part le drame absolu de l'incendie des Moulins, pour ce qui est de la délinquance ordinaire, nous n'avons pas connu de fait majeur. Alors même que nous avons reçu des évènements internationaux.
Quels résultats ont les vigiles privés de GAIDA, recrutés par les bailleurs sociaux et la Métropole pour protéger les HLM ?
Ils sont déjà très solides. Depuis mai dernier, 797 individus ont été évacués des halls et abords des immeubles, pour éviter troubles et nuisances. Des armes blanches ont été saisies à 34 reprises (soit généralement deux fois par semaine). Le GAIDA a aussi mené 31 saisies de drogues, très essentiellement du cannabis, par moments des pochons de cocaïne.
Où en êtes-vous des sanctions imposées aux dealers ?
Grâce à la convention que nous avons mise au point, nous avons obtenu de la Justice l'expulsion des logements sociaux de 150 trafiquants. Reste que nous attendons du préfet le concours de la force publique pour en mettre certaines en pratique. Il ne se passe pas une semaine sans que je relance…
Comme Christian Estrosi l'a annoncé, nous allons lancer un nouveau dispositif, sur le modèle de ce qui est fait en Isère, pour obtenir la suspension des allocations CAF à ces dealers.
La gauche locale craint un effet pervers, que les familles de ces gens-là se trouvent injustement pénalisées. Que répondez-vous ?
Avant de demander l'expulsion, ces familles sont reçues par Côte d'Azur Habitat. S'il y a des difficultés, comme par exemple des mamans seules, dépassées, nous cherchons à les accompagner. Ces procédures sont menées au cas par cas.
Je vais vous dire quelque chose de tragique pour notre société. On se rend compte que souvent, les trafiquants n'ont plus aucune inquiétude pour leur propre sort, ils se préoccupent uniquement de celui de leur mère. J'ai entendu des dizaines de fois : "peu importe ce qu'il m'arrive, mais ne touchez pas à famille". Si c'est le seul ressort pour en finir avec le deal, il faut l'employer.
Vos agents de Côte d'Azur Habitat, mais aussi les vigiles privés sont menacés voire agressés presque chaque mois dans les cités niçoises. Que faire ?
Ne rien céder. Nous sommes toujours au côté des agents, et nous nous constituons partie civile à chaque fois. Je remercie le procureur de porter des sanctions très lourdes à l'endroit de ces agresseurs. On dérange le trafic, à la fois par les opérations de police que par celles de notre rénovation urbaine.
Depuis l'incendie meurtrier de juillet, les dealers continuent de patrouiller armés, des habitants sont toujours soumis à la loi des trafiquants. Qu'est-ce qui a réellement changé ?
Je ne peux pas comprendre que devant l'immeuble incendié, dans un quartier traumatisé, le deal ait déjà repris ! Comment comprendre que nous ne soyons pas capables d'éradiquer cela ? Allons-y cet après-midi, ils seront toujours là !
Contrairement à ce que dit le préfet Hugues Moutouh, nous n'avons pas assez de policiers nationaux. Le gouvernement a fait des efforts, mais le proximité de la frontière et le caractère touristique de Nice n'ont pas été suffisamment pris en compte. Le narcotrafic a pris une forme unique ici. Dans 70% des cas, ceux qui sont arrêtés sont des clandestins. Et les prix de vente des drogues sont bien supérieurs ici qu'ailleurs, puisqu'il y a une demande avec des moyens. C'est de nature à appâter le crime organisé. Nous demanderons des renforts au nouveau ministre de l'Intérieur.
La crise des migrants mineurs isolés se poursuit, avec des populations qui se retrouvent dans des conditions de vie atroces près de la coulée verte, ou sous des ponts. Pourquoi ça ne change pas ?
En effet, il n'y a aucune amélioration dans la prise en charge, qui est une compétence partagée à la fois par l'État et par le Conseil départemental.
Il y a un problème de salubrité autour de l'église du Voeu. La justice nous a donné tort dans un premier temps, mais sur la base de nouvelles expertises nous allons, à nouveau, réclamer une expulsion. Cette occupation du parvis et d'un pan de la coulée verte est insupportable pour les familles.
Quel bilan tirez-vous du couvre-feu imposé aux mineurs de moins de 13 et 16 ans, selon les quartiers ?
Cet arrêté a envoyé un message extrêmement important aux parents et aux mineurs. Les agents en ont trouvé assez peu dans les rues le soir et la nuit, malgré de nombreuses opérations. On a une quinzaine de jeunes qui ont dû être reconduits chez eux, qui ont fait l'objet d'un rappel à l'ordre. Certains parents ont été convoqués. Et on ne note aucune récidive.
Vous souhaitiez développer la vidéo-verbalisation sur les pistes cyclables. Qu'en a dit la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés ?
Nous avons reçu un refus. Elle explique que nous ne devrions pas utiliser de caméras pour cette infraction spécifique. Il est aussi interdit d'avertir automatiquement l'opérateur du CSU (le centre où les images de la vidéoprotection sont reçues, ndlr) qu'une moto ou qu'un scooter entre sur une voie cyclable".
Nous avons dû mettre fin à notre expérimentation pour répondre à la loi (de 1978): c'est quelque chose que je regrette, et que je dénonce.
Cette décision est de nature à nous empêcher de réprimer tout un tas d'incivilités dont les riverains se plaignent quotidiennement. Evidemment, nous nous réorganisons pour que la présence humaine dissuade et verbalise. Cela nous incite surtout à poursuivre notre combat pour moderniser la législation en vigueur !
Rue d'Angleterre ça trafique à 20 m du local de la police municipale dont on ne voit les agents que lorsqu'ils sortent fumer!! Engageons plus de fumeurs!!